La ferme familiale continue à jouer un rôle important dans l’économie canadienne et bénéficie à ce titre d’un statut particulier en vertu des lois fiscales du Canada. Deux stratégies de planification fiscale importantes peuvent être utilisées lors du transfert d’une propriété agricole canadienne. La déduction pour gains en capital peut servir à mettre à l’abri de l’impôt des gains en capital réalisés lors des transferts de biens agricoles admissibles, et le transfert intergénérationnel d’une propriété agricole par application des dispositions de roulement (le « roulement intergénérationnel ») permet le transfert d’une propriété agricole à d’autres membres de la famille en franchise d’impôt. Les deux stratégies peuvent s’appliquer aux transferts ayant lieu du vivant du propriétaire (p. ex., vente ou don) ou à son décès. Les règles entourant ces stratégies sont très complexes et cette présentation est d’ordre général seulement. Comme pour toute planification fiscale, il est essentiel d’obtenir des conseils professionnels pour comprendre les répercussions propres à votre situation.
Qu’est-ce qu’une entreprise agricole?
Aux fins de la fiscalité, l’exploitation agricole comprend la culture du sol, l’élevage ou l’exposition d’animaux de ferme, l’entretien de chevaux de course, l’élevage de la volaille, l’élevage des animaux à fourrure, la production laitière, la pomoculture et l’apiculture, etc. Cette liste n’est pas exhaustive et d’autres activités peuvent être considérées comme agricoles. Toutefois, la location d’un bien à des fins agricoles dans le cadre d’une « entente de métayage » n’est pas considérée comme une activité agricole. La question de savoir si une activité agricole est considérée comme une entreprise est un autre facteur à prendre en considération et est tributaire du temps et des efforts déployés, entre autres critères.
Déduction pour gains en capital sur une propriété agricole admissible
Un particulier résident du Canada dispose d’une déduction pour gains en capital à vie pour mettre à l’abri des gains en capital sur les actions admissibles d’une petite entreprise et les biens agricoles ou de pêche admissibles, qui est réduite lorsque des demandes antérieures de déduction pour gains en capital ont été faites par le particulier. Le budget fédéral de 2024 proposait d’augmenter la déduction cumulative pour gains en capital à 1 250 000 $, en vigueur pour les dispositions effectuées à compter du 25 juin 2024, avec indexation de ce montant à compter de 20261, étant donné que le montant de la déduction à vie n’était que de 500 000 $ jusqu’en 2007; il peut être avantageux pour les personnes qui ont déjà demandé une partie de leur déduction cumulative actuelle d’envisager une planification qui leur permettrait d’avoir droit à tout montant non utilisé à vie.
Les propriétés admissibles comprennent notamment les terres utilisées dans une entreprise agricole canadienne ou une participation dans une société agricole familiale qui appartient à une société par actions ou une société en nom collectif.
Cette déduction présente de nombreuses règles complexes. Par exemple, les critères de détermination comprennent notamment si le propriétaire participe à l’exploitation agricole de façon régulière et continue et si le revenu tiré de l’entreprise est supérieur au revenu provenant de toutes les autres sources pendant au moins deux ans. Des critères moins pénalisants peuvent s’appliquer lorsque la propriété agricole a été acquise avant le 18 juin 1987. En outre, certains montants réclamés par un particulier, comme les pertes au titre d’un placement d’entreprise, les pertes en capital, les frais d’intérêt ou d’autres frais de placement admissibles (c.-à-d. les pertes nettes cumulatives sur placements), peuvent le priver de son droit de réclamer ou le reporter. De plus, d’autres considérations fiscales personnelles, comme l’application d’un « impôt minimum de remplacement », peuvent découler de l’utilisation de la déduction pour gains en capital, ce qui en réduit sa réalisation des gains.
De nombreuses stratégies de planification fiscale sont offertes pour tirer un avantage optimal de la déduction pour gains en capital2. Il peut être possible de restructurer la propriété de l’exploitation agricole admissible – afin de multiplier le recours à la déduction – en la rendant accessible à d’autres membres de la famille à l’avenir. Il peut également être possible de déclencher immédiatement le recours à la déduction sans changement de propriété effective au moyen d’une transaction appelée « cristallisation ». Cela aurait l’avantage de créer une augmentation de l’assiette fiscale de la propriété, ce qui réduirait le gain en capital sur une vente ou un transfert futur (p. ex., au décès). La planification fiscale de la déduction est souvent combinée à un gel successoral qui transfère la croissance future à d’autres membres de la famille (habituellement à l’abri de l’impôt) et peut limiter l’impôt à payer au décès du cédant en fonction du gain accumulé au moment du gel. On recommande de chercher des conseils judicieux en matière de planification fiscale auprès de professionnels qui ont une expertise et une expérience précises afin de voir quelles sont les occasions d’utiliser la déduction de votre vivant ou dans le cadre d’une planification successorale fiscalement avantageuse.
La déduction pour gains en capital est indépendante du roulement intergénérationnel d’une propriété agricole qui peut empêcher la réalisation de gains en capital ou la récupération de la déduction pour amortissement (c.- à- d. l’amortissement fiscal) sur une propriété agricole lorsqu’elle est transférée à un enfant ou à un petit-enfant. Les critères d’admissibilité ne sont pas identiques pour les deux stratégies, même si, dans bien des cas, les deux peuvent potentiellement réduire ou reporter l’impôt sur les transferts de propriétés agricoles admissibles.
Profiter du roulement intergénérationnel
Les propriétés agricoles canadiennes, y compris les actions d’une société agricole familiale, permettent un avantage fiscal supplémentaire sous la forme d’un report d’impôt. Plus précisément, un agriculteur peut être en mesure de transférer les intérêts de la ferme familiale à ses enfants (ou petits-enfants) résidents du Canada à l’abri de l’impôt de son vivant ou à son décès. En général, l’enfant hérite de l’assiette fiscale du parent afin que le gain reporté puisse être imposable lorsque l’enfant dispose par la suite de la propriété. En théorie, les fermes qui passent de génération en génération peuvent échapper indéfiniment à l’impôt sur les gains en capital. Les exigences relatives aux propriétés agricoles par rapport à cette règle sont différentes des exigences relatives à la déduction pour gains en capital et, par conséquent, ce report d’impôt peut ne pas être offert même si la propriété agricole est admissible à la déduction pour gains en capital. Même lorsque le transfert intergénérationnel est possible, il peut tout de même y avoir une obligation fiscale envers votre succession si votre liquidateur choisit de ne pas mettre en œuvre le transfert lorsque vos bénéficiaires ont l’intention de vendre la propriété et de recevoir le produit au lieu de la propriété agricole même (en supposant que la déduction pour gains en capital n’est pas possible).
Intégrer des stratégies de planification fiscale pour les propriétés agricoles à votre plan successoral
Dans l’idéal, il faut recourir à la déduction pour gains en capital ou à des stratégies de planification fiscale en cas de roulement intergénérationnel pour les propriétés agricoles afin de tirer le maximum d’avantages, lorsque c’est possible. Toutefois, cela peut être particulièrement difficile lorsque certains membres de la famille hériteront de la propriété agricole ou exploiteront l’entreprise agricole, tandis que d’autres n’en feront rien. Des conflits peuvent survenir en raison des intérêts contradictoires de ces légataires. Une stratégie qui profite à un légataire sur le plan fiscal peut réduire la part de l’héritage d’un autre légataire. Il est important que votre plan successoral tienne compte de la possibilité de ces stratégies fiscales et de leur incidence sur tous les légataires et sur votre succession dans son ensemble. Par exemple, le roulement intergénérationnel peut permettre d’économiser de l’impôt successoral, mais au bout du compte, l’impôt sur le gain non réalisé peut être payable par l’enfant qui reçoit ou hérite de la propriété agricole, car l’assiette fiscale n’augmentera pas. À l’inverse, ’assiette fiscale des autres biens hérités par les autres enfants correspondra généralement à la juste valeur marchande au moment du décès, et l’impôt supplémentaire ne sera payable que sur d’autres augmentations de valeur après le transfert.
Demander conseil
La planification fiscale et successorale d’une ferme familiale suppose la consultation de conseillers professionnels, car les règles sont très techniques et complexes. De plus, la situation de chaque personne est unique à bien des égards et nécessite l’expertise d’un professionnel pour personnaliser le plan ou la solution appropriés en fonction de sa situation particulière et de ses objectifs personnels. Vous pourriez avoir besoin d’un conseiller fiscal, d’un avocat spécialisé en planification successorale et d’un évaluateur professionnel.
Pour en savoir plus, adressez-vous à votre conseiller de BMO Gestion privée.
1Au moment de la rédaction (février 2025), la loi visant à faire passer la déduction pour gains en capital à 1,25 M$ demeure à l’état d’ébauche. Compte tenu de la récente prorogation du Parlement, il est possible que cette augmentation proposée ne soit pas adoptée. Veuillez consulter notre publication Nouveaux taux d’inclusion des gains en capital - Mise en œuvre reportée jusqu’en 2026 ou consulter votre fiscaliste personnel pour obtenir des directives à l’égard de votre situation particulière en attendant que les choses évoluent.
2Des mesures fiscales anti-évitement visant à empêcher le « dépouillement des bénéfices » d’une société peuvent s’appliquer au transfert d’une entreprise (agricole) à un membre de la famille (contrairement à la vente à un acheteur tiers) en vue de convertir un gain en capital réalisé par ailleurs sur le transfert en un dividende imposable (assujetti à un taux d’imposition plus élevé qu’un gain en capital et non admissible à la déduction pour gains en capital). De récentes modifications à la loi fiscale ont été apportées en vue de corriger cette incohérence dans la loi et de faciliter d’autres restructurations d’entreprise complexes et fiscalement avantageuses impliquant des entreprises (agricoles) familiales. Pour en savoir plus, veuillez vous adresser à votre professionnel en services financiers de BMO, qui pourra vous fournir un exemplaire de notre publication intitulée. Transferts intergénérationnels d’entreprises familiales, et consultez votre fiscaliste personnel pour obtenir des conseils sur votre situation particulière.
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