Au cours de la dernière année, la volatilité des marchés a semblé être la règle plutôt que l’exception. La menace constante des tarifs douaniers et de l’instabilité géopolitique peut vous donner l’impression d’avancer en solitaire dans des montagnes russes émotionnelles, mais vous n’êtes pas seul.
De nombreux investisseurs deviennent nerveux lorsque le cycle des nouvelles n’est fait que de désastres, d’opinions diverses et de phrases toutes faites. Un sondage mené en 2021 a révélé que 66 % des investisseurs ont regretté une décision de placement prise sous le coup de l’émotion (article en anglais seulement).
La clé consiste à ne pas laisser ces réactions instinctives orienter vos comportements en matière de placement, surtout lorsque les dirigeants de grandes entreprises, les responsables politiques et les personnalités médiatiques sont susceptibles d’intervenir et de provoquer des hausses ou des baisses momentanées du marché. C’est là que la finance comportementale entre en jeu.
L’idée derrière la finance comportementale est que notre cerveau a tendance à sauter aux conclusions en s’appuyant sur certaines règles précises et inconscientes que les humains ont développées pour survivre à un moment de notre histoire évolutive. Ces règles, appelées préjugés ou heuristique, fonctionnent à partir d’émotions incitant à la lutte ou à la fuite, comme la peur, l’anxiété et l’excitation, et elles nous empêchent de prendre des décisions rationnelles dans le feu de l’action.
Comme l’anxiété et la peur semblent aujourd’hui constituer la règle plutôt que l’exception, voici trois façons de contrôler vos émotions lorsque l’instabilité domine.
Méfiez-vous de l’instinct grégaire
Qu’il s’agisse de l’action d’une entreprise dont tout le monde veut se débarrasser après l’éclatement d’un scandale impliquant un dirigeant d’entreprise ou de la frénésie d’investissement que l’on peut observer au sujet d’une nouvelle technologie d’intelligence artificielle qui se veut révolutionnaire mais n’a jamais été testée, il est difficile de s’empêcher de suivre le troupeau. Notre tendance naturelle à faire comme la majorité est ancrée dans notre instinct de survie plutôt que dans la logique, et même si cela a aidé nos ancêtres à échapper aux prédateurs, cela ne nous sert pas dans des situations plus complexes.
Lorsque vous vous sentez poussé à faire comme la masse des investisseurs, la meilleure chose à faire est de prendre un moment pour vous questionner. L’effet d’un tel questionnement est double : d’abord, il vous permet de vous débrancher du pilote automatique qui vous pousse à agir de façon impulsive, et ensuite, en vous donnant du temps, vous serez mieux en mesure d’examiner les faits avant de vous forger une opinion.
De nombreuses études ont été menées sur l’effet de l’instinct grégaire sur le marché boursier, car il peut accroître la volatilité et déstabiliser les marchés financiers à l’échelle mondiale (article en anglais seulement). Mais il n’est pas nécessaire de remonter bien loin pour voir cet état d’esprit à l’œuvre. Les marchés ont fluctué considérablement en avril 2025, en réaction aux menaces de l’administration américaine d’imposer des tarifs douaniers à ses alliés comme à ses adversaires. Les investisseurs du monde entier ont suivi la vague, mais à la fin du mois, les cours des actions étaient revenus à leurs niveaux précédents et ils atteignent aujourd’hui des sommets historiques. Bien qu’il y ait eu davantage de stabilité durant l’été qu’au cours du printemps, les changements incessants de la politique commerciale du président américain vis-à-vis du Canada ont fait en sorte qu’il est difficile pour les économistes de pouvoir prévoir l’évolution des choses. Plutôt que de réagir avec panique à une baisse des marchés liée aux tarifs douaniers, les investisseurs donnent le temps aux choses de se placer.
Cessez de vous raconter des histoires
Pour bon nombre d’entre nous, se raconter des histoires fait partie de notre façon de voir le monde. En tant que société, nous avons tendance à élaborer des narratifs accommodants pour expliquer les choses qui se sont produites, même lorsque nous ne disposons pas de tous les faits. Par exemple, lorsque l’inflation a bondi entre 2021 et 2022, certains Canadiens ont blâmé le premier ministre au lieu de la confluence d’événements comme la pandémie de COVID-19, les perturbations de la chaîne d’approvisionnement et la guerre en Ukraine.
Cette tendance à préférer une bonne histoire, souvent simplifiée à l’extrême, plutôt que de considérer la série d’événements ayant mené à une situation donnée comme étant une combinaison de facteurs aléatoires et intentionnels, s’appelle un sophisme narratif. C’est un écueil courant pour les investisseurs, les experts financiers et les sources de nouvelles, qui cherchent des façons faciles d’expliquer les fluctuations du marché boursier qui sont en fait causées par un ensemble de raisons.
Comme pour les autres préjugés et l’heuristique, la clé pour éviter les sophismes narratifs ou aller au-delà consiste à vous appuyer sur votre esprit rationnel pour prendre du recul et examiner les faits, plutôt que de tomber dans le piège. Laissez l’analyse du marché fondée sur les données alimenter vos décisions et tenez-vous-en à vos objectifs de placement à long terme lorsque vous êtes tenté de changer de cap en raison d’une bonne histoire.
Ne vous fiez pas à votre mémoire
Si vous avez déjà entendu parler d’un incident violent survenu dans un quartier ou lu une nouvelle à ce sujet et que vous avez par la suite réfléchi à deux fois avant de vous rendre dans ce quartier, vous avez peut-être été victime de l’heuristique de disponibilité. Cette expression, inventée par Amos Tversky et le regretté Daniel Kahneman, considéré par beaucoup comme le grand-père de la finance comportementale, fait référence à un raccourci mental que nous prenons parfois lorsque nous anticipons la probabilité qu’un événement se produise (article en anglais seulement).
Le cerveau fondera ses prédictions sur n’importe quel exemple ou élément d’information qui nous vient à l’esprit en premier, ou sur ce qui est à notre disposition sur-le-champ. Dans l’exemple du quartier mentionné ci-dessus, vous êtes plus susceptible de vous rappeler l’article sur l’incident violent qu’un rapport plus récent sur les faibles taux de criminalité dans la région, simplement parce qu’il vous aura fait une plus grande impression.
Pour les investisseurs, cela se traduit par des décisions de placement fondées sur les nouvelles les plus mémorables ou les plus sensationnelles plutôt que sur les plus pertinentes. Au cours du premier semestre de 2025, il semblait que les avions tombaient du ciel à un rythme sans précédent. L’écrasement du vol d’Air India le 12 juin a entraîné une baisse de 4,9 % des actions de Boeing durant la nuit. Toutefois, les données mensuelles publiées par le National Transportation Safety Board des États-Unis indiquent que le nombre d’accidents d’avion dans le monde est demeuré à peu près stable au cours des dernières années, en incluant les données de 2025 à ce jour (articles en anglais seulement).
À l’ère de l’information en continu, la meilleure chose que vous puissiez faire pour éviter de tomber dans le piège de l’heuristique de disponibilité est de vous appuyer sur un large éventail de sources d’information – des nombreux médias aux statistiques approuvées par le gouvernement – plutôt que de vous fier à votre mémoire ou à la machine à rumeurs.
Bien que les événements mondiaux puissent être imprévisibles, comprendre ce qui nous motive à investir comme nous le faisons nous aidera à prendre de meilleures décisions en période de volatilité.