L’achat d’une propriété en Floride ou en Arizona peut être une option attrayante pour toute personne qui cherche à échapper au froid d’un autre hiver canadien. Mais alors que les Canadiens font l’objet d’une surveillance accrue à la frontière et que l’on constate une hausse des primes d’assurance, des frais de copropriété et des frais des associations de propriétaires, les États-Unis pourraient perdre de leur attrait pour certains retraités migrateurs.
La vente d’une propriété américaine à titre de résident canadien aux fins de l’impôt peut être un processus complexe. Il faut naviguer dans deux systèmes fiscaux avec des règles, des devises et des échéances différentes. Avant de vendre une propriété, voici ce que vous devez savoir pour que la vente se déroule bien et pour garder plus d’argent dans vos poches.
Comment la vente est imposée aux États-Unis
Si vous vendez une propriété aux États-Unis à un prix supérieur à celui que vous avez payé pour celle-ci, vous vous attendez peut-être déjà à payer de l’impôt sur les gains en capital sur la différence. Mais ce que de nombreux Canadiens ne savent peut-être pas, c’est qu’il peut y avoir une obligation fiscale partagée entre l’Internal Revenue Service (IRS) et l’Agence du revenu du Canada (ARC).
Bien qu’il existe certaines exceptions, la loi intitulée Foreign Investment in Real Property Tax Act (FIRPTA) aux États-Unis exige que l’acheteur retienne 15 % du prix de vente brut – et non du bénéfice – et le remette à l’IRS à la conclusion sous forme de versement. Par exemple, si vous vendez une maison pour 1 million de dollars américains, la retenue d’impôt de 15 % sera de 150 000 $ américains. Il ne s’agit pas de l’impôt final ou total que vous pourriez devoir; il s’agit d’une retenue temporaire pour s’assurer que l’IRS est payé. Votre facture d’impôt réelle est calculée plus tard, lorsque vous produisez vos déclarations de revenus au Canada et aux États-Unis, afin de déclarer le gain en capital réalisé.
Voyez cette retenue d’impôt comme un dépôt de garantie pour l’IRS, dont une partie pourrait vous être retournée à une date ultérieure. Dans bien des cas, le montant retenu est supérieur à votre impôt réel à payer, ce qui signifie que votre argent pourrait être immobilisé auprès de l’IRS pendant des mois.
Réduction de la retenue d’impôt
La clé pour réduire la retenue d’impôt est de demander les bons documents avant la conclusion de la vente. Selon Dante Rossi, directeur général, Planification fiscale à BMO Gestion privée, les Canadiens peuvent demander un certificat d’exonération de retenue de l’IRS avant la conclusion, ce qui peut réduire le montant de la retenue d’impôt pour tenir compte de l’impôt dû prévu (sur le gain en capital), et non selon le prix de vente total.
Le problème? Le traitement du certificat peut prendre jusqu’à trois mois – plus longtemps si la demande contient des erreurs ou des omissions. Au bout du compte, votre facture d’impôt finale pourrait ne pas être différente malgré le certificat, explique M. Rossi, auquel cas l’incidence financière de la retenue se résume en fait à la valeur spéculative de l’argent.
Jean Richard, directeur principal et consultant en fiscalité transfrontalière et internationale à BMO, souligne que le gain sur la vente de biens immobiliers par une personne non ressortissante des États-Unis doit être déclaré aux États-Unis au moyen d’une déclaration de revenus des particuliers non-résidents.
Par exemple, si vous achetez une propriété pour 400 000 $ US et que vous la vendez des années plus tard pour 1 million $ US, vous obtenez un gain en capital de 600 000 $ US. Si ce gain était assujetti à l’impôt fédéral maximal de 20 % sur les gains en capital, votre facture fiscale américaine pourrait atteindre 120 000 $ US. C’est 30 000 $ de moins que le montant de la retenue d’impôt indiqué plus tôt sur le produit brut et, selon la période de l’année, vous pourriez attendre des mois pour le récupérer.
Le recouvrement des fonds retenus dépend de la date de conclusion. Les ventes effectuées à la fin de l’année vous permettent de produire votre déclaration de revenus aux États-Unis plus tôt l’année suivante et de récupérer votre argent plus rapidement. Mais si vous vendez en janvier, l’argent dormira beaucoup plus longtemps, explique M. Richard.
Le travail visant à obtenir le remboursement d’une partie de la retenue d’impôt commence après la vente. Les Canadiens doivent produire une déclaration de revenus comme non-résidents des États-Unis pour déclarer le gain réel, calculer l’impôt réel dû et demander un remboursement si un montant trop élevé a été retenu.
De nombreux vendeurs sautent cette étape et perdent de l’argent auquel ils ont droit. C’est une erreur, explique Jean Richard. « Nombreux sont ceux qui pensent que la retenue d’impôt est un impôt final, mais ce n’est pas le cas. »
Le côté canadien de la vente
Une fois que vous avez traité avec l’IRS, il y a toujours le côté canadien à prendre en considération. En tant que résident canadien, vous êtes assujetti à l’impôt sur votre revenu mondial, ce qui signifie que vous devez également déclarer la vente dans votre déclaration de revenus au Canada, explique M. Rossi.
Lorsque vous déclarerez la vente à l’ARC, vous devrez le faire en dollars canadiens en fonction du taux de change en vigueur au moment où vous avez acheté la propriété et au moment de la vente, de sorte que les fluctuations de devise peuvent faire partie de votre gain imposable. Pour revenir à l’exemple précédent, si vous avez acheté la propriété pour 400 000 $ US en 2007, lorsque les dollars canadien et américain étaient à parité, votre coût aurait été d’environ 400 000 $ CA. Mais si vous la vendiez aujourd’hui pour 1 million de dollars américains, les taux de change actuels traduiraient ce montant à environ 1,4 million de dollars canadiens. Du point de vue de l’ARC, votre gain en capital est plus près de 1 million de dollars, comparativement à 600 000 $ US aux yeux de l’IRS.
Bien que les taux d’imposition fédéraux aux États-Unis s’élèvent à un maximum de 20 % pour les gains à long terme, au Canada, la moitié de vos gains en capital est ajoutée à votre revenu imposable et imposée à votre taux marginal. Selon la province où vous vivez et votre tranche d’imposition, votre taux d’imposition effectif sur le gain pourrait dépasser 25 %.
Heureusement, le système de crédit pour impôt étranger empêche la double imposition. En vertu de ce système, l’impôt américain admissible sur le gain peut être réclamé à titre de crédit d’impôt étranger au Canada pour l’impôt payé aux États-Unis. Si l’impôt canadien sur le gain est supérieur à ce que vous avez payé aux États-Unis, vous devez essentiellement payer la différence à l’ARC. « Au bout du compte, le montant total à payer est le plus élevé des deux pays, mais pas les deux, explique M. Richard.
Vente à perte
Malheureusement, si vous vendez votre propriété à perte, cette perte n’offre aucun allégement fiscal au Canada. C’est parce que vous ne pouvez pas réclamer une perte en capital sur votre résidence principale ou votre résidence secondaire personnelle comme vous le pouvez avec un immeuble de placement (ce qui signifie que vous ne pouvez pas l’utiliser pour compenser d’autres gains ou réduire votre facture d’impôt).
Le défi, selon Jean Richard, est que l’exigence de retenue d’impôt des États-Unis s’applique toujours : 15 % du prix de vente doit être versé à l’IRS au moment de la conclusion, même en cas de perte. Sans le certificat d’exonération de retenue de l’IRS, sur une vente de 800 000 $, cela signifie que 120 000 $ seront immobilisés, même si aucun impôt n’est dû dans l’un ou l’autre des deux pays.
« Dans le cas d’une vente à perte, le certificat d’exonération de retenue sera probablement approuvé, mais vous devrez fournir des documents », explique M. Richard. Bien entendu, le défi réside dans le choix du moment. Il faut environ trois mois pour obtenir un certificat d’exonération de retenue d’impôt, ce qui peut nuire aux vendeurs qui tentent de conclure une transaction rapidement, explique-t-il.
Ce que vous pouvez faire maintenant
Pour réduire au minimum votre facture fiscale, il faut commencer bien avant que vous mettiez la propriété en vente. Jean Richard recommande de tenir des dossiers détaillés de votre prix d’achat initial ainsi que de toutes les améliorations apportées aux immobilisations au fil du temps. Les rénovations, les ajouts et les mises à niveau importantes peuvent augmenter votre prix de base rajusté, ce qui réduit votre gain imposable lorsque vous vendez.
Le jour de la vente de la propriété, n’ayez pas peur de demander de l’aide. Dante Rossi recommande aux Canadiens de travailler avec des conseillers fiscaux transfrontaliers qui comprennent les deux systèmes et qui peuvent composer avec les certificats d’exonération de retenue d’impôt, les crédits pour impôt étranger et les exigences relatives à la double déclaration. Les coûts de la conformité, qui comprennent la production de tous les documents auprès de l’IRS et la déclaration de revenus des deux côtés de la frontière, peuvent être importants et assez complexes, c’est pourquoi il est recommandé d’obtenir des conseils fiscaux avant de vendre une propriété aux États-Unis, explique M. Rossi.
Et bien qu’il n’y ait aucun moyen d’éliminer votre obligation fiscale, une planification adéquate peut réduire ce que vous devez. « C’est un peu comme une dette », explique Jean Richard. « Mais ce que vous pouvez faire, c’est réduire le montant à payer lorsque vous vendrez. »