Trump 2.0 : sortir le Canada et l’Europe de leur léthargie
Réduction de la pondération des actions en fonction de la pondération du marché
Légère surpondération du Canada – Sous-pondération des États-Unis et pondération égale à celle du marché pour l’Europe et les pays émergents
Il est de plus en plus clair que les tarifs douaniers et les guerres commerciales de Donald Trump sont moins un moyen de parvenir à une fin qu’une fin en soi. Les répercussions sont profondes. L’incidence macroéconomique est doublement négative, car elle fait augmenter l’inflation, qui n’est pas encore maîtrisée en Amérique du Nord selon les dernières données américaines et canadiennes, tout en réduisant la croissance économique. Nous ne sommes pas prêts à parler de « stagflation », mais c’est certainement un pas dans cette direction. Même si l’administration Trump nuit à sa crédibilité à long terme (il sera difficile pour les alliés de lui faire confiance en ce qui a trait au commerce, à l’aide et à la défense pendant des années à venir), ce qui est encourageant, c’est que cela ébranle déjà le Canada et l’Europe par suite de leur complaisance et de leur dépendance à l’égard des États-Unis. En fin de compte, malgré les difficultés à court terme, nous avons maintenant de meilleures chances à long terme de stimuler nos propres dépenses dans les infrastructures, notre productivité, notre secteur manufacturier intérieur et nos capacités de défense, qui ont été un point de faiblesse chronique.
Par conséquent, nous profitons aujourd’hui de la très récente remontée du marché américain pour effectuer son plus important changement de répartition de l’actif en plus de dix ans. Nous réduisons notre recommandation générale d’actions à la pondération du marché et sous-pondérons les actions américaines, une première pour les Services-conseils en gestion de portefeuille. Cela s’explique par : 1) les tendances à la détérioration en matière d’inflation, de croissance et de déficit budgétaire (en particulier avec les suppressions massives d’emplois dans l’IRS et les éventuelles réductions d’impôts supplémentaires); 2) les nuages à l’horizon de l’emploi; et 3) la très forte concentration dans le S&P 500, où les « sept magnifiques » représentent encore un tiers du marché et les valorisations onéreuses, sans marge de sécurité suffisante. Nous constatons également que le momentum des bénéfices (estimations du BPA du S&P 500) se détériore rapidement et que les résultats des sondages sur le moral des consommateurs et des entreprises sont en chute libre, puisqu’ils se situent actuellement à leur niveau le plus bas depuis plusieurs années.
Nous maintenons une légère préférence pour les actions canadiennes, étant donné qu’un gouvernement plus axé sur l’économie est attendu d’une manière ou d’une autre. Les perspectives d’accélération des mesures de relance, y compris les dépenses d’infrastructure et de défense, la prochaine réduction significative des barrières commerciales provinciales et les valorisations beaucoup plus faibles des actions sont également des éléments positifs. Nous suggérons également une pondération égale à celle du marché en Europe (en raison des mesures de relance, du momentum économique croissant et des valorisations bon marché) et sur les marchés émergents (en raison des stimulus de la Chine, d’un meilleur momentum économique relatif et de valorisations généralement faibles). Simultanément, nous augmentons notre pondération : 1) aux liquidités, pour être plus défensifs et avoir plus de souplesse pour tirer parti des occasions liées aux actions et aux obligations à mesure qu’elles se présentent en 2025- 2026; 2) aux titres à revenu fixe, en raison du fait que les taux d’intérêt ne tiennent pas entièrement compte des risques économiques, ce qui pourrait s’avérer positif pour les portefeuilles d’obligations. Les surprises à la hausse liées à l’inflation pourraient en fin de compte limiter la baisse des rendements des obligations d’État, ce qui favoriserait une position de liquidités.
L’une des principales préoccupations est que notre modèle1 exclusif de probabilité de récession a suivi une tendance à la hausse depuis le milieu de l’année dernière, avec une probabilité de récession de 49 % au cours des douze prochains mois, et ce, avant la mise en oeuvre des tarifs réciproques le 2 avril. Soit dit en passant, même si le président Trump décide de retarder, de reporter, de réduire ou de modifier (choisissez votre descripteur) les tarifs, nous croyons que l’incertitude même qu’il a instaurée aura une incidence négative sur les décisions de placement futures des sociétés. À ce sujet, un sondage mené récemment par la chaîne CNBC montre que 95 % des chefs des finances s’attendent maintenant à une récession au deuxième semestre de 2025. Nous comprenons l’argument selon lequel les sondages d’opinion aux extrêmes peuvent être un bon indicateur à contre-courant, mais ce n’est pas la recette pour une croissance majeure des dépenses en immobilisations des sociétés.
Nous pensons que M. Trump se concentre beaucoup trop sur le déficit commercial (il considère que le reste du monde « arnaque » l’Amérique) et pas assez sur le déficit budgétaire. En gros, le déficit commercial s’explique par le fait que les consommateurs américains constituent la cohorte la plus riche que l’humanité ait jamais vue et qu’ils sont très enclins à acheter des « choses ». En fait, la valeur nette des ménages américains vient d’atteindre un sommet de 169 000 milliards de dollars au quatrième trimestre de 2024 (chiffre comparable pour le Canada : 17 500 milliards de dollars, un record également). À l’inverse, le reste du monde n’a pas les moyens financiers d’acheter autant de produits et services des États- Unis, ce qui crée un déficit aux États-Unis et un surplus pour ses partenaires commerciaux. L’autre aspect important du commerce mondial, c’est qu’une grande partie des surplus commerciaux des autres pays, celui de la Chine étant de loin le plus important, ont historiquement été recyclés en obligations du Trésor américain, ce qui a stimulé le dollar américain et contribué à maintenir les taux d’intérêt américains plus bas.
À notre avis, le déficit budgétaire présente un risque beaucoup plus grand. Certes, les États-Unis sont dans cette situation depuis longtemps, mais le déficit actuel de 6 % du PIB est trop élevé compte tenu du fait que nous sommes dans une phase d’expansion économique. L’orthodoxie économique suggère qu’il est prudent d’enregistrer un surplus en période de vaches grasses pour stimuler l’économie en cas de récession ou de choc exogène. S’ils étaient toujours en vie, les économistes légendaires John Maynard Keynes et Milton Friedman ne leur auraient pas donné une étoile dorée pour cette performance. La monnaie de réserve mondiale offre à un pays une souplesse exceptionnelle, mais, compte tenu de la politique étrangère actuelle des États-Unis et de la possibilité d’une perte de confiance à long terme à l’égard du commerce, de la défense et de l’aide des pays développés alliés, il est possible qu’il y ait moins de demande pour la dette américaine. Oui, il y aura toujours un prix de compensation pour les obligations américaines, mais le coût de vente pourrait être plus élevé, ce qui signifie des taux d’intérêt plus élevés, également préjudiciables à la croissance.
Le rapprochement de Trump avec la Russie et sa rhétorique à la Poutine ont également surpris plusieurs observateurs. À notre avis, Vladimir Poutine n’est peut-être pas un bon exemple à suivre, du moins en ce qui concerne les marchés financiers. À l’heure actuelle, il est pratiquement impossible d’investir dans les actions russes, et le rouble russe s’est déprécié de 240 % par rapport au dollar américain depuis 2000, date de l’arrivée au pouvoir de M. Poutine, même en tenant compte de la récente remontée des cours.
Évaluation de la juste valeur de l’indice S&P/TSX et de l’indice S&P 500
Nous avons revu à la baisse notre évaluation de la juste valeur des indices de référence S&P/TSX et S&P 500, les faisant passer respectivement de 29 000 à 27 000 et de 6 500 à 5 700. Les estimations de bénéfices au Canada et aux États-Unis ont été revues à la baisse, et nous modérons les attentes de croissance du BPA compte tenu des risques plus évidents de récession en Amérique du Nord. Nous avons également augmenté notre taux d’actualisation de 50 points de base pour tenir compte de l’incertitude croissante à l’égard de l’économie et des politiques des deux marchés (maintenant à un taux raisonnable de 9 %).
Mise à jour macroéconomique d’Études économiques BMO sur l’Europe et les plus grands marchés émergents
Europe
La Banque centrale européenne (BCE) a réduit ses taux de 150 pdb depuis le début du cycle, la dernière baisse de 25 pdb le 6 mars à 2,50 % étant largement attendue. La banque centrale considère toujours que le processus de désinflation est « en bonne voie » et que « la politique monétaire devient nettement moins restrictive ». Cette position laisse présager une diminution des baisses de taux, bien qu’il soit possible qu’il y en ait d’autres, étant donné que la guerre commerciale n’a pas encore véritablement pris de l’ampleur. Mais maintenant, le Conseil des gouverneurs peut prendre du recul et voir comment ces tarifs auront une incidence sur l’inflation et la croissance, et être rassuré de savoir qu’il ne s’attaque pas à cela seul. L’Allemagne apporte son soutien en proposant de débloquer un fonds de 500 milliards d’euros sur 10 ou 12 ans pour la défense et les infrastructures, en dehors du frein constitutionnel à l’endettement. Comme l’a dit le nouveau chancelier Friedrich Merz, il fera tout ce qu’il faudra, et ce fonds massif aura un effet multiplicateur d’une à deux fois, selon certaines estimations. Cela donne à penser que l’économie pourrait croître d’environ 1,5 % grâce à ces dépenses, ce qui serait bienvenu après que l’économie allemande s’est contractée pendant deux années consécutives. Ce fonds, combiné au fonds de 150 milliards d’euros de la Commission européenne destiné à prêter des armes, aidera la BCE à faire son travail.
Chine
L’économie de l’Empire du Milieu a terminé l’année 2024 sur une note positive, ce qui n’est pas très surprenant compte tenu de l’offensive politique de la fin septembre. Le PIB réel global a augmenté de 5,4 % par rapport aux attentes sur
douze mois au quatrième trimestre.
Ainsi, l’économie chinoise a de nouveau atteint l’objectif initial du gouvernement pour l’ensemble de l’année, à savoir « environ 5 % ». La bonne nouvelle, c’est que l’économie chinoise a pris de l’élan en ce début d’année, surtout par rapport aux difficultés de l’été. Elle sera donc beaucoup plus en mesure de faire face à une guerre commerciale plus intense avec les États-Unis ou à une montée du protectionnisme mondial. La mauvaise nouvelle, c’est que certaines améliorations économiques clés observées ces derniers temps pourraient s’avérer temporaires. Les fortes hausses de la production industrielle et des exportations de marchandises, qui ont augmenté respectivement de 6,2 % et de 10,7 % sur douze mois en décembre, pourraient avoir été principalement motivées par le désir des entreprises étrangères d’anticiper les éventuels tarifs douaniers imposés par le président Trump. Par ailleurs, la hausse (modeste) des ventes au détail, de 3,7 % sur douze mois, est largement soutenue par les politiques d’échange d’appareils électroménagers et de véhicules électriques mises en oeuvre pour les consommateurs. Il convient de mentionner que le gouvernement a récemment élargi la liste des produits qui peuvent profiter du programme (y compris les fours à micro-ondes, les lave-vaisselle, etc.), et des rapports indiquent que des biens numériques, comme les tablettes et les montres intelligentes, pourraient également recevoir des subventions. Nous considérons ces subventions comme des versements en argent par Beijing.
Inde
Stabilité politique et sociale
Le contexte politique intérieur demeure stable. Le premier ministre Narendra Modi, du parti conservateur Bharatiya Janata (BJP), a obtenu un troisième mandat de cinq ans aux élections générales de 2024. Contre toute attente, le BJP a perdu sa majorité absolue et n’a remporté que 240 des 543 sièges, soit une perte de 63, dans la Lok Sabha (chambre basse). Le BJP a néanmoins conservé une emprise ferme sur le pouvoir par l’intermédiaire de la coalition élargie NDA, qui a obtenu 293 sièges dans l’ensemble contre les 234 sièges de l’opposition INDIA. Le BJP se réunit après le repli et remporte des victoires au niveau des États, notamment à Delhi, capitale nationale, où il reprendra le pouvoir pour la première fois en 27 ans. Le reste de l’année est peu chargé en échéances électorales, ce qui est de bon augure pour le programme de réformes. M. Modi met l’accent sur la promotion des investissements et le soutien de la classe moyenne, tout en réduisant le déficit budgétaire. Les politiques commerciales protectionnistes de l’Inde sont sous les feux de la rampe en réaction aux menaces des États-Unis d’imposer des tarifs douaniers réciproques à leurs partenaires commerciaux. À la suite de la réunion de la Maison-Blanche tenue en février, M. Modi s’est engagé à intensifier le commerce bilatéral, notamment en augmentant les achats d’énergie et de matériel militaire des États-Unis. Les relations avec les États-Unis devraient rester solides sous Trump 2.0, car M. Modi entretient de bonnes relations personnelles avec le président et l’Inde est un allié stratégique important des États-Unis en Asie. La cote moyenne de gouvernance de la Banque mondiale pour le pays est restée inchangée au 48e centile en 2023.
Stabilité et rendement économiques
L’économie indienne a ralenti au cours de l’exercice en cours (exercice 2024-2025, terminé en mars 2025), après un rebond après trois ans très vigoureux, au cours duquel la croissance moyenne a été de 8,8 %. La consommation privée a été le principal retardataire dans un contexte de taux d’intérêt élevés et de faiblesse du marché du travail (c’est-à-dire une création d’emplois timide et une stagnation des revenus réels). L’allègement substantiel de l’impôt sur le revenu prévu dans le dernier budget, la baisse de l’inflation et l’assouplissement monétaire devraient soutenir la consommation urbaine au cours de la période à venir, tandis que la vigueur persistante du secteur agricole soutiendra la demande rurale. Par conséquent, après avoir glissé à seulement 5,4 % sur douze mois au trimestre de juillet à septembre, la croissance du PIB réel devrait passer à 6,3 % pour l’ensemble de l’année et à environ 6,5 % pour l’exercice 2025-2026. Toutefois, les perspectives sont assombries par une incertitude accrue en matière de politique géopolitique et commerciale (à savoir les tarifs douaniers réciproques sur les importations américaines), qui pourrait peser sur les investissements privés et les exportations. Parallèlement, l’approche récente du gouvernement visant à stimuler la croissance au moyen de dépenses d’infrastructure fait face à des contraintes budgétaires et à une pénurie de projets prêts à mettre en oeuvre. L’IPC global s’est établi à 4,3 % sur douze mois en janvier, tandis que l’inflation de base n’a été que de 3,7 %, soit près du point médian de la fourchette cible de 2 % à 6 % de la Reserve Bank of India (RBI). La RBI a entamé un cycle d’assouplissement en février (-25 pdb à 6,25 %) et devrait encore réduire son taux de 50 pdb cette année. Bien que la déclaration ait mis l’accent sur une position neutre, le nouveau gouverneur semble disposé à autoriser une nouvelle dépréciation de la roupie afin de soutenir la croissance.
Corée du Sud
Stabilité politique et sociale
La Corée du Sud a été touchée de manière inattendue par des turbulences politiques internes au début du mois de décembre, suite à la révocation rapide de la déclaration de loi martiale du président Yoon Seok-youl (citant les menaces des forces pro-nord-coréennes). Le président Yoon et l’ancien président par intérim Han Duck-Soo ont par la suite été destitués les 14 et 27 décembre, respectivement. Cependant, les résultats demeurent très incertains, car la Cour constitutionnelle a jusqu’à six mois pour décider si elle maintiendra ou rejettera les votes sur la destitution. Il convient de noter que si c’est la première fois qu’un mandat d’arrêt est délivré à l’encontre d’un président en exercice, ce n’est pas la première fois qu’un président sud-coréen est mis en accusation, la cour ayant rejeté la mise en accusation de Roh Moo-hyun en 2004, mais accepté celle de Park Geun-hye en 2016. Si la destitution du président Yoon est confirmée, une nouvelle élection présidentielle doit être organisée dans les 60 jours. S’il évite la destitution, les prochaines élections ne seront pas attendues avant le mois de mai 2027, mais il est important de noter que M. Yoon ne peut pas briguer un autre mandat. Cependant, il est peu probable que l’escalade actuelle du risque politique ait un impact majeur sur l’élaboration de la politique économique, en particulier sur la politique budgétaire, où la pression en faveur de la consolidation reste forte. Il semble par ailleurs raisonnable de penser que le classement moyen de la Corée du Sud dans les indicateurs de gouvernance de la Banque mondiale, qui a progressé jusqu’au 80e centile en 2023 (contre le 79e auparavant), pourrait en souffrir à l’avenir (mais plus probablement dans les résultats de 2025). Sans surprise, l’indicateur de stabilité politique et d’absence de violence reste une source de faiblesse de longue date (68e) en raison des tensions géopolitiques avec la Corée du Nord. Les tensions ne cesseront pas de sitôt, car Pyongyang demeure déterminé à provoquer Séoul/Washington.
Stabilité et rendement économiques
Il est peu probable que les turbulences politiques intérieures aient des répercussions importantes sur l’économie coréenne en 2025. Néanmoins, cela refroidira la confiance des entreprises et des consommateurs à court terme. En revanche, le secteur manufacturier devrait continuer de profiter d’un environnement externe favorable, notamment les efforts accrus de la Chine (le plus important marché d’exportation de la Corée, à 19,2 % du total des expéditions de marchandises) pour stimuler son économie. Par ailleurs, la Corée ne semble pas dans la ligne de mire directe des hausses tarifaires potentielles du président Trump, même si l’on ne peut pas entièrement écarter ce risque, car elle présente un important excédent commercial bilatéral par rapport à la moyenne américaine (semblable au Canada et au Japon). Par conséquent, nous prévoyons que la croissance du PIB réel de la Corée ralentira pour s’établir à 1,5 % en 2025, comparativement à une estimation de 2,1 % en 2024. La croissance devrait rebondir pour atteindre 2,0 % en 2026, ce qui serait conforme au potentiel à moyen terme de l’économie. Le marché de l’emploi demeure relativement vigoureux, bien que le taux de chômage corrigé des variations saisonnières ait grimpé à 3,7 % en décembre (contre 2,7 % en novembre), ce qui est largement considéré comme une hausse temporaire. Par ailleurs, l’inflation des prix à la consommation, à 1,9 % sur douze mois en décembre, demeure conforme à la cible d’inflation à moyen terme de 2,0 %. La Banque de Corée (BoK) pourra ainsi abaisser son taux directeur de 50 pdb supplémentaires en 2025, après l’avoir réduit de 50 pdb pour le porter à 3,0 % en 2024.
Brésil
Stabilité politique et sociale
Les craintes de voir le gauchiste Luiz Inácio Lula da Silva opérer un net virage à gauche par rapport aux politiques économiques orthodoxes et pro-entreprises de l’administration précédente ne se sont pas concrétisées. Un ensemble de freins et de contrepoids institutionnels combinés aux forces du marché financier ont empêché Lula de le faire. Notamment, le Parti des travailleurs de Lula et ses alliés n’ont tout simplement pas assez de sièges dans les deux chambres du Congrès pour adopter de nouvelles lois comme ils l’entendent. Néanmoins, il n’est pas certain que l’administration Lula soit en mesure de respecter son nouveau cadre et ses nouvelles règles budgétaires, ce qui explique en partie pourquoi le réal brésilien a été l’une des monnaies les moins performantes par rapport au billet vert cette année. Pour le reste, il semble que Lula soit revenu au principe du non-alignement, vieux de plusieurs décennies, destiné à servir au mieux les intérêts du pays dans un monde de plus en plus multipolaire. Autrement dit, le Brésil veut maintenant être l’ami de tous, y compris de la Chine, ce qui pourrait entraîner une relation plus litigieuse avec le contexte politique polarisé des États-Unis. Le paysage politique polarisée du Brésil (Congrès fragmenté avec plus de 20 partis représentés) et les fortes inégalités de revenus se reflètent dans le classement moyen relativement faible du pays dans les six indicateurs de gouvernance clés de la Banque mondiale, qui est passé au 39e centile en 2023 (contre 40e en 2022 et un sommet de 57e en 2010).
Stabilité et rendement économiques
La résilience économique du Brésil a été une surprise agréable, surtout grâce à une saine consommation privée, soutenue par les transferts budgétaires, une hausse du salaire minimum et un marché de l’emploi serré, et à la hausse des placements à revenu fixe. Soulignons que le taux de chômage a chuté à 6,2 % en trois mois en octobre, soit son plus bas niveau depuis le début de 2015, en partie grâce à la création d’emplois dans la nouvelle économie/ le contexte de travail à la demande ainsi qu’aux réformes précédentes du marché du travail. Nous prévoyons que le PIB réel, en hausse de 3,3 % sur douze mois au cours des trois premiers trimestres de 2024, affichera une croissance de 3,2 % pour l’ensemble de l’année et de 2,0 % en 2025 (par rapport à +2,9 % en 2023). De plus, le FMI a récemment révisé à la hausse ses prévisions de croissance du potentiel à moyen terme de 0,5 point de pourcentage pour les porter à 2,5 % grâce à la réforme fiscale visant à accroître l’efficience et la valeur ajoutée et à l’accélération de la production d’hydrocarbures. La vigueur de l’économie aide à expliquer pourquoi il est plus difficile de maîtriser l’inflation que la banque centrale (BCB) l’avait initialement envisagé. L’IPC global a augmenté de 4,8 % sur douze mois en octobre, alors qu’il avait atteint son plus bas niveau en avril (3,7 %) et, plus important encore, il est supérieur à la cible d’inflation de fin d’année de la BCB, comprise entre 1,50 % et -4,50 %. Par conséquent, la BCB a été forcée de faire marche arrière en matière de politique monétaire cette année et de relever le taux Selic de 75 pdb combinés pour le porter à 11,25 % lors de ses deux dernières réunions. Avant la hausse de septembre, la BCB avait réduit ses taux de 325 pdb au cours des douze mois précédents pour les porter à 10,5 %. Les observateurs brésiliens et les indicateurs des marchés financiers privés prévoient tous deux que le taux Selic augmentera de 150 à 250 pdb supplémentaires au cours de la prochaine année.
Analyse technique
Le rebond à court terme pourrait se poursuivre, mais les indicateurs à moyen et long terme se détériorent
Les marchés boursiers nord-américains ont récemment terminé un processus classique de correction à moyen terme qui s’est avéré généralement conforme à nos attentes, comme nous l’avons indiqué dans nos récents commentaires sur la stratégie. Toutes les grandes moyennes ont testé, dans une certaine mesure, la hausse de leurs moyennes mobiles sur 200 jours, puis elles sont revenues à la hausse, accompagnées de nouveaux signaux d’achat dans notre modèle d’anticipation à court terme.
En ce qui concerne le potentiel de hausse, nous nous attendons à ce que l’indice composé S&P/TSX et l’indice S&P 500 dépassent leurs sommets historiques du début de 2025 (TSX : 25 875, S&P : 6 147). Des cassures permettraient d’établir de nouvelles cibles de hausse de 27 605 et de 6 790, respectivement. Voilà la bonne nouvelle. La mauvaise nouvelle, c’est que l’objectif de 6 790 de l’indice S&P 500 semble un peu trop ambitieux en raison des signes de détérioration des indicateurs que nous appelons nos « canaris dans la mine de charbon ». En règle générale, ces indicateurs se renversent et deviennent négatifs de six à douze mois avant les véritables marchés baissiers (baisses de 20 % ou plus), et ce que nous observons actuellement est conforme aux pics des marchés haussiers antérieurs qui se sont produits depuis la crise du crédit. Par exemple, les indicateurs de momentum à long terme se sont récemment retournés et sont devenus négatifs, le pourcentage d’actions du S&P 500 se négociant au-dessus de leurs moyennes mobiles à long terme se détériore également depuis quelques mois, et d’autres mesures de l’activité économique basées sur le marché n’ont pas non plus confirmé les récents sommets historiques du S&P 500.
Titres à revenu fixe
L’objectif premier de notre stratégie de répartition de l’actif proposée est de réduire l’exposition globale aux actifs à risque, mais il ne s’agit pas nécessairement d’une forte conviction en faveur de la baisse des taux d’intérêt. C’est pourquoi nous proposons de diviser le produit de notre révision à la baisse de la pondération des actions entre les liquidités et les titres à revenu fixe dans des comptes équilibrés afin de relever les répartitions à la pondération de l’indice de référence. Si la décision était de ne vendre que des actions libellées en dollars américains, il serait judicieux de conserver des liquidités, compte tenu des taux d’intérêt à court terme attrayants aux États-Unis, qui se situent autour de 4 % et plus. Mais au Canada, les taux d’intérêt ne sont plus aussi attrayants en raison du ralentissement de la croissance et de l’inflation et de l’assouplissement important opéré par la Banque du Canada (BdC) au cours des neuf derniers mois. Par ailleurs, compte tenu des écarts historiques entre les courbes de rendement du Canada et des États-Unis (taux plus bas au Canada), l’attrait de notre marché obligataire s’en trouve réduit, ce qui justifie notre opinion de ne pas surpondérer les titres à revenu fixe.
Même si la BdC a abaissé les taux en mars et pourrait y être de nouveau forcée si la guerre commerciale persiste, elle n’a pas manifesté d’intérêt pour de nouvelles réductions de taux. Cela signifie qu’à part la volatilité plus élevée découlant de l’incertitude, la fourchette de négociation actuelle pourrait se maintenir, et il est probable que les investisseurs continueront d’opter pour la prudence dans un avenir proche jusqu’à ce que cette guerre commerciale se poursuive, s’intensifie ou soit résolue. Si l’on se réfère aux indices des obligations canadiennes à court et moyen terme, les taux d’intérêt nominaux seraient supérieurs à 3 %, ce qui est un peu mieux que ce à quoi on peut s’attendre des liquidités en dollars canadiens.
Objectivement, la perspective d’une guerre commerciale prolongée qui aurait une incidence négative sur les actifs à risque amènerait la BdC, et possiblement la Réserve fédérale américaine (la Fed), à assouplir davantage les taux directeurs et à entraîner une baisse des taux des obligations fédérales à court terme. Toutefois, cela peut également s’accompagner d’une pression inflationniste accrue, ce qui a pour effet de limiter la baisse des rendements des obligations d’État, en particulier des taux à long terme.
Il convient de noter que malgré toute l’incertitude et les risques pour l’économie, les taux de rendement canadiens, bien que volatils, n’ont pas diminué de manière significative, en particulier dans les secteurs à moyen et long terme. Depuis le jour de l’investiture, les taux au Canada à 5 ans et à 10 ans ont respectivement reculé de moins de 25 et de 15 pdb, tandis que les taux à long terme sont pratiquement inchangés (en baisse de 5 pdb). Certes, les risques économiques augmentent, mais le marché obligataire ne semble pas disposé à évaluer le risque d’inflation et n’est peut-être même pas positionné pour affronter d’éventuelles hausses-surprises de l’IPC, comme ce fut le cas récemment au Canada. En plus des répercussions des tarifs douaniers et de la faiblesse de la monnaie sur les prix, la perspective de mesures de relance accélérées de notre prochain gouvernement fédéral pourrait ajouter des pressions inflationnistes. C’est pourquoi nous recommandons de concentrer l’exposition aux obligations sur les secteurs à court et à moyen terme et de sous-pondérer les échéances plus longues et plus sensibles aux taux d’intérêt.
On peut en dire autant des marchés des titres de créance de sociétés. Bien que certains signes préoccupants aient récemment été observés, les écarts de taux au Canada et aux États-Unis ayant atteint leur plus haut niveau en quatre mois, les conditions demeurent généralement bien équilibrées, compte tenu de l’activité normale du marché secondaire et de la demande satisfaisante de nouveaux approvisionnements sans concessions importantes. Même le niveau de rémunération offert pour se lancer dans des titres de créance moins élevés, en passant du secteur des obligations de catégorie investissement (notation BBB faible et supérieure) au secteur des obligations (de pacotille) à haut rendement (notation BB élevée et inférieure), reste serré par rapport au passé. Les émissions récentes aux États-Unis ont même été revues à la hausse pour répondre à la forte demande.
Cela dit, il y a lieu de se demander si la rémunération actuelle des rendements pour ajouter une exposition au risque des entreprises est adéquate et si le marché ne fait pas preuve d’une certaine complaisance. Les politiques commerciales peuvent nuire gravement à certains bénéfices et bilans de sociétés, et le contexte incertain actuel peut modifier considérablement des stratégies qui pourraient ne pas être entièrement reflétées dans les niveaux des écarts de cours. Pour les investisseurs en obligations de sociétés, cela signifie que la baisse des taux d’intérêt pourrait se traduire par des écarts plus importants et avoir une incidence sur les rendements. À notre avis, cela plaide en faveur d’une approche plus défensive à l’égard des titres de créance, en mettant l’accent sur le secteur à court terme, sur un bêta plus faible et sur des titres de qualité supérieure (notés A- et plus). Compte tenu de l’évolution récente de la situation, les investisseurs pour considérer d’inclure les émetteurs de premier ordre du secteur des pipelines et, pour des raisons évidentes (comme les tarifs), nous éviterions d’investir dans le secteur de l’automobile à court terme.
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