Le vent tourne pour les banques canadiennes
Dans le monde des placements, les titres les plus délaissés sont parfois ceux qui offrent le meilleur rapport risque/rendement. Ainsi, depuis le début de 2022, les investisseurs boudent massivement les banques canadiennes (malgré leurs antécédents à long terme spectaculaires d’augmentation des dividendes et de création de valeur pour l’actionnaire). Même si le choix du moment est toujours délicat, nous y voyons une occasion pour les investisseurs à long terme (par opposition aux boursicoteurs). Le contraste avec les valeurs technologiques à très forte capitalisation est particulièrement frappant cette année. En fait, même si l’indice S&P 500 affiche une hausse impressionnante de 13 % depuis le début de 2023, si l’on exclut les 10 sociétés les plus performantes (presque toutes des géants de la technologie), on obtient un gain à un chiffre beaucoup plus modeste. Pour autant, comme il est indiqué dans notre analyse technique à la page suivante, la participation au marché des actions à faible capitalisation et à l’échelle des secteurs commence vraiment à s’élargir, ce qui augure bien pour certains secteurs à la traîne comme celui des produits financiers.
Nous ne cessons d’affirmer qu’une récession à court terme est loin d’être inévitable et, le mois dernier, nous nous sommes dit convaincus que le marché nord-américain de l’habitation avait touché un plancher. Ce point de vue implique un certain nombre de possibilités de placement, mais nous pensons que les banques à forte capitalisation devraient être les premières à en profiter, en raison de leur forte exposition à l’économie et à l’immobilier.
Les données récentes continuent de nous conforter dans cette idée. Tout d’abord, l’inflation continue de ralentir. Cette tendance a de profondes répercussions. Non seulement elle réduit la probabilité de hausses excessives des taux d’intérêt, mais elle dopera également les marchés des titres à revenu fixe et des actions; traditionnellement, les actions bénéficient d’une expansion moyenne des multiples de 30 % lorsque l’IPC diminue. Les plus récentes données publiées au Canada sont encourageantes. En particulier, les prix à la consommation (mesurés par l’IPC) ont grimpé de 0,4 % et de 3,4 % sur 12 mois en mai, tandis que l’inflation globale a ralenti d’un point de pourcentage par rapport au mois précédent. L’IPC corrigé des variations saisonnières a augmenté d’à peine 0,1 %, sa plus faible hausse en 2023. Aux États-Unis, les anticipations d’inflation à un an ont diminué pour le troisième mois de suite. L’économie américaine continue de défier les oiseaux de malheur qui prédisent une récession imminente.
BMO Marchés des capitaux a récemment réalisé une analyse détaillée des tendances du crédit et des réserves pour prêts des banques canadiennes et a conclu ce qui suit : « […] les provisions pour pertes sur créances sont généralement plus élevées qu’avant la pandémie. Notre examen des niveaux de risque de crédit et des réserves à la fin du deuxième trimestre de 2023 ne nous a pas amenés à modifier nos prévisions concernant les provisions pour pertes sur créances […]. Si nos conclusions concernant la qualité du crédit, la suffisance des réserves et le coût des provisions se vérifient, un risque important pesant sur nos prévisions de bénéfices sera plus ou moins éliminé, ce qui nous laisse penser que le risque de baisse pesant sur les ratios cours/bénéfice prévisionnels est limité; une réévaluation à la hausse nécessiterait un contexte de revenus plus favorable. Une fois que l’attitude envers les banques se sera améliorée (ce qui est lié aux perspectives macroéconomiques), nous prévoyons que les titres meilleur marché surclasseront les autres […]. »
De notre point de vue, cela réduit le principal risque qui plane sur les actions bancaires : des provisions pour créances irrécouvrables insuffisantes, qui peuvent compromettre gravement la rentabilité. Les réserves des banques canadiennes, en particulier, restent toutes excédentaires. Avec la reprise de l’élan économique prévu en 2024 et l’amélioration du marché du logement, la croissance des revenus devrait s’accélérer au cours des prochains trimestres, ce qui entraînera des hausses de dividendes soutenues.
Nous sommes également confortés par la performance historique des banques par rapport aux tendances de l’inflation. Le secteur des produits financiers compte parmi les secteurs les plus performants lorsque l’inflation diminue d’au moins 2,5 % en glissement annuel (ce qui est manifestement le cas) et après que la Réserve fédérale américaine marque une pause dans la hausse des taux d’intérêt aux États-Unis (ce qui arrivera très prochainement).
Enfin, les niveaux de valorisation sont très intéressants. L’histoire montre qu’en investissant dans les banques canadiennes quand leurs titres sont bon marché, on obtient des rendements remarquables.
Analyse technique
Ces dernières semaines, des craintes concernant l’étroitesse de la participation aux marchés boursiers américains ont été exprimées dans les médias et ailleurs. Seule une poignée d’actions technologiques à très forte capitalisation étaient alors responsables de la majorité des gains de l’indice S&P 500. Même si le poids de ces actions dans l’indice implique qu’elles auront toujours un impact démesuré sur le rendement de ce dernier, quantité de signes attestent que la reprise est en train de se généraliser. Par exemple, en juin, nous avons observé la plus forte progression en cinq jours des actions à moyenne capitalisation depuis octobre, la plus forte progression en cinq jours des actions à faible capitalisation depuis plus de deux ans et la plus forte hausse en cinq jours du pourcentage d’actions cotées au NYSE se négociant au-dessus de leur moyenne mobile à 50 jours depuis fin 2020 (juste après les élections américaines). De plus, le nombre d’actions à atteindre de nouveaux sommets de 52 semaines a bondi à son plus haut niveau en plus de quatre mois. Enfin, la moyenne mobile à 10 jours de la valeur totale des titres américains négociés frôle un sommet de trois mois.
Indice de la finance S&P/TSX – Une clôture au-dessus du niveau de résistance à 3 560 signalerait l’amorce d’une nouvelle tendance haussière à long terme permettant de viser une première cible à la hausse de 3 965. Les nouveaux signaux d’achat des indicateurs de lancée à court terme font penser que la prochaine évolution importante se fera en direction de l’extrémité supérieure de la tendance de base. L’atteinte de cette dernière représenterait un gain de 25 % par rapport au niveau de fin juin; toutefois, étant donné les prévisions macroéconomiques haussières, on s’attend à une rupture avec la tendance de base.
Indice des fiducies de placement immobilier (FPI) S&P/TSX – L’indice des FPI S&P/TSX est actuellement en plein rebond après avoir atteint ses niveaux les plus survendus depuis le creux atteint lors de la pandémie, début 2020. On devrait à tout le moins s’attendre à ce qu’il renoue avec l’extrémité supérieure de sa tendance de base d’un an, soit 3 620. Cela représenterait un gain de près de 20 % par rapport au niveau de fin juin. Un franchissement de ce niveau, compte tenu des prévisions macroéconomiques haussières, ferait basculer la tendance à long terme vers la hausse et permettrait d’envisager initialement une cible à la hausse de 4 340, ce qui correspond plus ou moins au sommet absolu atteint fin 2021.
Des limites repoussées
La hausse de taux surprise de la Banque du Canada début juin a confirmé que, face à l’inflation persistante, les banquiers centraux commencent à s’impatienter. Il est rare que la politique de la Banque du Canada ait une incidence sur les marchés obligataires mondiaux. Combiné aux hausses surprises des taux d’intérêt en Australie et au Royaume-Uni, ce geste a entraîné une réévaluation des attentes concernant les politiques monétaires mondiales et exercé une pression à la hausse sur les taux à court terme. La Réserve fédérale des États-Unis a bien marqué une pause pour laisser à la dernière hausse le temps de produire ses effets, mais cela n’a pas empêché le taux de l’obligation du Trésor américain à 2 ans de se rapprocher de 5 %, car le ton ferme des décideurs de la Réserve fédérale des États-Unis laisse toujours entrevoir au moins une hausse de taux supplémentaire – sinon deux – cette année.
Il y a à peine deux trimestres, de nombreux économistes tablaient sur une légère contraction au Canada cet été. Au lieu de quoi, le marché du travail reste robuste, ce qui, combiné à une croissance démographique supérieure à la moyenne, continue de soutenir la consommation et la croissance économique. La contraction attendue a donc été retardée, tout comme le retour de l’inflation au taux cible. Cela explique en partie pourquoi, de façon générale, les taux d’intérêt sont presque revenus à leurs niveaux d’avant la première faillite bancaire aux États-Unis (celle de la Silicon Valley Bank, le 8 mars) – ou les ont même dépassés, dans le cas du Canada et du Royaume-Uni –, car les investisseurs se préparent à de nouveaux resserrements et excluent toute éventualité de virage monétaire en 2023.
Cette résilience économique contribue aussi à expliquer la vigueur générale des actifs risqués et, en particulier, des marchés du crédit. Bien que la plus récente remontée des taux des obligations d’État ait pesé sur le rendement annuel cumulatif, le secteur des obligations de sociétés a continué de surperformer. Une augmentation des revenus combinée à un resserrement des écarts de taux, soutenu en partie par un ralentissement des activités de financement, leur a conféré un avantage sur les obligations d’État. Outre les données économiques solides, la résorption de la crise bancaire et l’accord sur le plafond de la dette américaine ont permis aux écarts de revenir à leurs niveaux d’avant mars (sauf dans le secteur des produits financiers), pour dans bien des cas presque atteindre leurs niveaux les plus étroits en plus d’un an.
Un examen plus approfondi révèle toutefois des tendances divergentes, en particulier aux États-Unis. Les rapports encourageants sur le marché du travail, la faiblesse du chômage et la croissance continuent de se répercuter sur l’inflation. Cependant, en comparant la tendance des indicateurs avancés – comme les enquêtes auprès des directeurs d’achats, la semaine moyenne de travail et les inscriptions au chômage – aux indicateurs plus coïncidents ou retardés, on peut observer des signes évidents de décélération, ce qui devrait contribuer à ralentir davantage l’inflation.
Ce constat est encourageant, mais davantage d’efforts – et sûrement de temps – seront nécessaires; on prévoit donc toujours que les taux directeurs finaux seront plus élevés et, surtout, que les taux resteront élevés plus longtemps. Même si les investisseurs en obligations réévaluent leurs attentes à court terme à la hausse, leur optimisme ne se reflète pas de façon similaire dans la partie longue de la courbe. Comme on prévoit que les banques centrales réagiront à la résilience de l’économie par la fermeté, les taux à long terme continuent d’intégrer un ralentissement futur de la croissance et de l’inflation, ce qui accentue l’inversion de la courbe – la plus marquée depuis le début des années 1980. Rappelons que toutes les récessions de l’histoire récente ont été précédées d’une telle inversion.
Conclusion : il reste encore du travail à faire, mais nous nous rapprochons assurément de la fin du cycle de resserrement. Selon nos économistes de BMO, la Banque du Canada et la Réserve fédérale américaine pourraient relever au moins encore une fois leurs taux directeurs ce trimestre. Cela devrait maintenir une pression à la hausse sur les taux à court terme, tandis que les taux à long terme continueront de se stabiliser à l’extrémité supérieure de la fourchette jusqu’à ce que la fin de ce cycle soit confirmée.
Nous croyons qu’une duration neutre offre un bon équilibre entre un revenu attrayant et une protection en cas de données économiques ou d’inflation supérieures aux attentes, qui pourraient aggraver la volatilité dans la partie longue de la courbe.
En ce qui concerne la valorisation des risques sur le marché du crédit, nous pensons qu’elle est juste et que certains secteurs demeurent intéressants, ce qui justifie une position surpondérée. La courbe des taux indique peut-être un ralentissement futur, mais un marché des obligations de sociétés relativement solide annonce au pire une légère contraction. Une exception notable est la sous-performance du secteur des produits financiers, qui continue de souffrir des retombées de la crise des banques régionales américaines.
On ignore encore si ce bras de fer entre l’inflation et les banques centrales entraînera un atterrissage brutal ou en douceur. Certains observateurs ont peut-être déjà renoncé à la perspective d’une récession en raison de l’évolution des circonstances. Attention toutefois à ne pas écarter trop vite la nature prédictive de la courbe des taux. Compte tenu de la qualité des émetteurs bancaires canadiens en général, dont les écarts plus larges reflètent les risques attendus, nous considérons que les taux des titres à court et moyen terme, qui varient entre 4,5 % et 6 %, constituent une rémunération attrayante pour les portefeuilles jusqu’à ce que les résultats soient connus.
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