Dans le coin bleu : madame Harris. Dans le coin rouge : monsieur Trump.
En ces temps où les États-Unis doivent décider si une femme deviendra présidente du pays pour la première fois de l’histoire ou si Donald Trump obtiendra un deuxième mandat, le contraste entre les deux candidats ne pourrait être plus frappant. Le présent texte n’a pas pour but de nuire au gagnant potentiel, même si l’on constate que Donald Trump a gagné en force récemment, tant dans les sondages que dans les paris des marchés. Il vise plutôt à expliquer brièvement l’incidence potentielle de ce choix sur l’économie nord américaine et ses secteurs. Ironiquement, la vigueur de l’économie américaine continue de défier les sceptiques, et l’inflation a été en grande partie maîtrisée, mais les démocrates ne semblent pas obtenir beaucoup de mérite à cet égard. En termes très simples, Kamala Harris représente une certaine continuité avec l’administration actuelle, tandis que Donald Trump suscite plus d’incertitude compte tenu de sa propension aux déclarations irrévérencieuses. Nous avons souvent affirmé que le cycle économique est beaucoup plus important pour les marchés que le parti au pouvoir, mais, dans le cas présent, des politiques commerciales et fiscales divergentes pourraient avoir une incidence plus grande.
Mais d’abord, un peu d’histoire. De 1926 à 2023, le marché boursier américain a fait beaucoup mieux lorsqu’un démocrate était président, la plus-value s’élevant à 5 % par année. Le moment de la tenue des élections par rapport aux récessions ou aux périodes de fortes expansions économiques a sûrement joué un rôle important à cet égard, mais il est intéressant de noter que les démocrates ont conservé leur avantage (qui a toutefois diminué), même en excluant les périodes de Herbert Hoover (Grande Dépression) et de George W. Bush (crise financière). Ce qu’il faut retenir, c’est que les idées reçues (par exemple que les républicains sont meilleurs pour l’économie et les marchés) sont souvent contredites par les données.
Bien qu’il faille prendre les propositions actuelles avec un grain de sel (puisque les promesses faites pendant la campagne peuvent facilement être contrecarrées par le Congrès, selon sa composition1), nos partenaires de recherche de NDR estiment que la proposition de hausse du taux d’imposition des sociétés de Mme Harris pourrait réduire le BPA net des sociétés de l’indice S&P 500 de 9 %, tandis que la réduction d’impôt proposée par M. Trump pourrait le faire augmenter de 5 %. Mme Harris a également proposé une augmentation de l’impôt sur les gains en capital, ce qui, par le passé, a entraîné une baisse des rendements attendus du marché. NDR souligne que les rendements lors d’une année de hausses d’impôt sont inférieurs à la moyenne, avec un gain médian de 3,7 %. Même si la victoire de Donald Trump a déjà été partiellement prise en compte, elle pourrait tout de même stimuler le marché boursier à court terme. Cependant, lorsque la poussière commencera à retomber, certains investisseurs pourraient se demander s’il est sage d’accroître davantage le déficit et la dette de la principale économie du monde.
D’un point de vue macroéconomique, aucun des deux partis n’a été financièrement responsable au cours des dernières années. Par exemple, aux États-Unis, on prévoit quand même un ratio déficit-PIB de plus de 5 % en 2024, et ce, malgré la croissance de l’économie. Nous sommes peut-être un peu vieux jeu, mais les périodes d’expansion économique devraient être utilisées pour rembourser les dettes et non pour les alourdir. Conserver une certaine marge de manoeuvre pour les mesures de relance lorsqu’elles deviennent, inévitablement, nécessaires nous semble être la bonne approche à adopter, mais cela n’a pas été populaire chez les politiciens depuis longtemps.
Si M. Trump gagne, on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’il continue de relever les tarifs douaniers2, qui sont intrinsèquement inflationnistes, en particulier si d’autres pays adoptent des tactiques de représailles (pensez à ces tactiques comme à une taxe pour les consommateurs). Les tarifs douaniers ont également tendance à réduire les taux de croissance potentiels au fil du temps, ce qui n’aide pas les bénéfices des sociétés, en particulier ceux des multinationales qui tirent un fort pourcentage de leur chiffre d’affaires de l’extérieur des États-Unis (environ 40 % des profits de l’indice S&P 500 proviennent de l’étranger). Au Canada, il s’agit d’un risque important, étant donné que les exportations comptent pour un tiers de notre PIB et que 70 % de celles-ci sont destinées aux États Unis. Par ailleurs, même si nous sommes un acheteur clé des exportations américaines, les É.-U. jouent un rôle beaucoup plus important dans notre économie que l’inverse. L’équipe Études économiques de BMO précise qu’en cas de vague républicaine, l’économie canadienne pourrait initialement profiter d’une croissance plus forte aux États- Unis et les producteurs d’énergie canadiens se réjouir de l’éventuelle résurrection du pipeline Keystone XL, mais le pays risque d’être l’un des plus durement touchés (tout comme la Chine et le Mexique) en raison d’une possible guerre commerciale avec son plus important partenaire commercial.
Du point de vue des taux d’intérêt, la combinaison de la croissance des déficits et du protectionnisme commercial constitue le plus grand risque sous une présidence de M. Trump. Les réductions d’impôt et la diminution de la réglementation promises par les républicains seraient positives pour les écarts de taux, mais les risques importants associés à la hausse de l’inflation et à l’augmentation des besoins de financement du gouvernement exerceraient des pressions haussières sur les taux d’intérêt. Un tel contexte entraverait probablement la capacité de la Réserve fédérale à normaliser davantage sa politique monétaire.
D’un point de vue sectoriel, les principaux gagnants républicains devraient comprendre les secteurs/sociétés qui profitent d’une augmentation des tarifs douaniers (p. ex., actions du secteur de l’acier, automobile), de la déréglementation (services financiers, compagnies d’assurance maladie, grandes pharmaceutiques), de la diminution de la surveillance environnementale (énergie, mines), d’une augmentation des dépenses militaires et du maintien d’une réglementation conciliante en matière d’armes à feu. M. Trump est un fervent adepte des combustibles fossiles et il encouragerait sans doute la construction d’autres usines de gaz naturel liquéfié (GNL), ce qui devrait être favorable à long terme pour les prix du gaz naturel. Devin Dodge, analyste de BMO spécialisé dans le secteur industriel, souligne que si les républicains obtiennent la majorité au Congrès au terme des élections fédérales américaines, un protectionnisme accru pourrait alimenter les tendances de rapatriement de la production actuelles et accroître la capacité manufacturière et industrielle intérieure au fil du temps. Les chemins de fer, les entreprises de logistique des États-Unis et les sociétés d’automatisation d’usine en profiteraient également.
Les secteurs habituellement privilégiés par les démocrates sont les énergies renouvelables et les sociétés liées aux infrastructures. Brian Pitz, analyste de BMO et spécialiste de l’Internet, croit qu’une majorité démocrate aurait un résultat plus positif pour son secteur. Il souligne que les titres de l’univers qu’il couvre disposent de leviers en matière de revenus et de frais d’exploitation qui leur permettent de réduire l’incidence des taux d’imposition plus élevés sur le potentiel de bénéfices global. De plus, la stabilité géopolitique serait renforcée en raison d’événements qualitatifs relativement inchangés. Du point de vue des logiciels, l’analyste de BMO Keith Bachman ajoute que les dépenses en infrastructures ont favorisé la sélection de sociétés de logiciels verticaux et de conception, et qu’une administration démocrate pourrait mieux soutenir l’augmentation des dépenses au-delà de 2026.
En la richesse des ménages, nous croyons
On a beaucoup entendu parler de l’augmentation de la dette au niveau du gouvernement et des particuliers ainsi que de la menace majeure qu’elle représente pour l’économie et les marchés. Nous reconnaissons qu’une hausse continue de l’endettement présente un risque important à long terme et que les gouvernements devraient faire preuve d’une plus grande retenue (particulièrement en période d’expansion économique), mais nous souhaitons examiner de plus près les actifs du bilan.
Plus précisément, la valeur nette des ménages au Canada et aux États-Unis atteint des sommets historiques à, respectivement, 17 000 milliards de dollars et 163 000 milliards de dollars. Autrement dit, cette valeur nette représente 8 fois le PIB canadien et près de 6 fois le PIB américain. Nous croyons que ces actifs devraient aider à amortir les coups portés à l’économie nord-américaine et qu’ils continuent d’être un facteur favorable à la consommation et au marché. Cela s’explique principalement par l’effet de richesse, selon lequel une partie de l’augmentation du patrimoine est habituellement dépensée par les ménages (p. ex., une étude de la Banque du Canada du début des années 2000 rapportait une hausse de 2 cents de la consommation pour chaque dollar d’augmentation de la richesse sur le marché boursier). D’autres études ont montré que cet effet est plus prononcé pour les hausses de valeur des biens immobiliers, qui sont considérées comme plus permanentes de nature. La bonne nouvelle, c’est que les actifs financiers et immobiliers progressent fortement en parallèle.
Fait à signaler, la croissance de la valeur nette du patrimoine aux États-Unis a été généralisée dans l’ensemble des quintiles au cours du présent cycle (source : NDR). C’est très important, car cela devrait avoir pour effet de limiter la proportion de prêts en souffrance, ce qui favorise la croissance du crédit, l’économie et le marché des obligations de sociétés. Cette augmentation plus « équitable » du patrimoine amplifie la consommation accrue associée à l’effet de richesse, car les consommateurs moins fortunés ont une propension marginale plus élevée à dépenser (en pourcentage du revenu).
Analyse technique
Dans le commentaire du mois dernier, nous avions souligné que tous les voyants étaient au vert sur les marchés boursiers au début du quatrième trimestre, et la situation reste la même en ce début du mois de novembre.
Notre modèle d’anticipation à moyen terme, qui mesure les tendances sur 3 à 6 mois et plus, demeure haussier et favorable à de nouvelles hausses, la confiance à l’égard du marché du crédit demeure stable (« si les analystes obligataires ne sont pas inquiets, nous ne le sommes pas » est notre devise) et les secteurs démontrant un appétit pour le risque continuent de surpasser les secteurs où l’aversion pour le risque prédomine.
De plus, le mois de novembre marque le début de la plus forte période consécutive de trois mois pour les actions, ici et aux États-Unis, avec des rendements moyens de 4,30 % pour l’indice S&P 500 et de 4,33 % pour l’indice TSX. En ce qui concerne le potentiel de hausse, l’indice composé S&P/TSX a émergé, plus tôt cette année, d’une importante fourchette de négociation de deux ans, ce qui a ouvert la voie à une cible haussière à 26 257. L’atteinte d’une telle cible représenterait un gain de 46,9 % par rapport au creux d’octobre 2022 et, même si cela peut sembler ambitieux, c’est encore bien en deçà de la moyenne de 61,85 % des cinq marchés haussiers cycliques depuis la crise du crédit. Au sud de la frontière, le récent passage de l’indice S&P 500 au-dessus de la résistance à 5 669 a laissé la place à une cible de hausse à 6 219, qui demeure en vigueur. Les secteurs favoris comprennent la consommation discrétionnaire, l’industrie, les services financiers et les FPI, qui continuent tous de profiter de la tendance à la baisse des taux d’intérêt et qui ont atteint de nouveaux sommets sur le plan des rendements absolus ou relatifs au cours des dernières semaines.
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1La composition du Congrès aura aussi une importance considérable, car il est notoire que l’adoption de lois nationales est difficile lorsque la Maison-Blanche, la Chambre des représentants ou le Sénat sont contrôlés par différents partis. Même en cas de vague républicaine ou démocrate, l’intensification de la polarisation politique ne garantit pas des victoires législatives faciles.
2Jusqu’à présent, M. Trump a promis 1) de relever les tarifs douaniers de 10 à 20 % sur l’ensemble des importations et d’au moins 60 % sur les produits chinois; 2) d’imposer des tarifs punitifs aux fabricants nationaux qui externalisent leur production au Mexique, notamment avec des taux allant de 100 % à 200 % pour les constructeurs automobiles et des taux à 200 % pour John Deere et 3) d’imposer des tarifs douaniers allant jusqu’à 200 % sur les véhicules produits par des sociétés étrangères (issues de pays hors de l’Amérique du Nord) délocalisées au Mexique.
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