Commentaire sur les marchés mondiaux
« Les gens du monde entier étaient à l’unisson
À l’unisson pour les filles et les garçons
Et les enfants du monde entier espéraient en l’avenir
Tic-tac, tic-tac, tic-tac, il faut se souvenir
Que le temps est compté. »
Stevie Ray Vaughan, Tick Tock
Les actions ont enregistré des gains substantiels au troisième trimestre malgré la morosité de septembre qui a été fidèle à sa réputation de mois défavorable aux actions. La tendance haussière qui portait les marchés boursiers depuis la fin de mars s’est interrompue le mois dernier. Avant septembre, la forte progression des actions de grandes sociétés technologiques avait amené les investisseurs à se demander si l’indice composé Nasdaq était une bombe à retardement. Même si les actions les plus dynamiques du groupe FAANG (Facebook, Amazon, Apple, Netflix et Google) ont subi des corrections de plus de 10 % en septembre, les rendements globaux du troisième trimestre ont été assez robustes.
Le mois dernier, les tensions causées par l’approche du 3 novembre, jour de l’élection américaine, se sont aussi intensifiées sur les marchés. Les inquiétudes ont augmenté à la suite d’une conférence de presse dans laquelle le président Trump ne s’est pas engagé à une passation pacifique des pouvoirs si le candidat démocrate Joe Biden était élu.
Le décès inattendu de la juge à la Cour suprême Ruth Bader Ginsburg (également connue sous le nom de Notorious RBG) le 18 septembre, à l’âge de 87 ans, a fait grimper l’anxiété politique. Les républicains ont exercé des pressions pour qu’un successeur soit nommé tandis que les démocrates ont exigé que le siège reste vacant jusqu’à la fin du premier mandat de Donald Trump. M. Trump a rapidement présenté la candidature d’Amy Coney Barrett, juge fédérale et fervente conservatrice. Les audiences pour sa confirmation et un vote auront probablement lieu avant que les Américains se rendent aux urnes.
Le premier débat présidentiel télévisé a été cacophonique et entaché de chamailleries et d’attaques personnelles. M. Trump a été responsable de la majeure partie des interruptions (128, selon le magazine Slate) imposées à M. Biden et au modérateur Chris Wallace. Le président a adopté un ton agressif et son adversaire a mordu à l’hameçon à plusieurs reprises. Les deux hommes ont parlé en même temps et ont esquivé les enjeux cruciaux, laissant dans le flou les électeurs indécis. La commission chargée d’organiser les débats électoraux a annoncé qu’elle mettrait en place « des mesures additionnelles » pour les deux prochains débats afin de « maintenir l’ordre ».
Des catastrophes naturelles, notamment de gigantesques incendies en Californie, se sont ajoutées aux préoccupations suscitées par la pandémie. Une nouvelle vague de coronavirus en Europe et l’augmentation exponentielle des cas aux États-Unis ont fait peser la menace d’un deuxième confinement généralisé, dont l’incidence sur la reprise économique pourrait être désastreuse. Le bilan mondial des décès attribuables à la COVID-19 s’élève maintenant à un million de personnes.
Canada – Mieux vaut tard que jamais
L’économie canadienne a poursuivi son parcours vers la reprise. Le taux de chômage s’est replié à 10,2 % depuis le pic de 13,7 % atteint en mai. Bien que la pandémie ait effacé trois millions d’emplois, près de deux millions d’entre eux ont été récupérés. Statistique Canada a fait état d’une croissance économique de 3,0 % en juillet, ce qui est conforme à l’estimation préliminaire de l’organisme.
La Banque du Canada a laissé les taux d’intérêt inchangés à sa dernière réunion de politique monétaire. Le gouverneur Tiff Macklem a fait le point sur la situation économique, signalant que le rebond de l’économie canadienne avait été plus fort que prévu. « Cette récession a été exceptionnellement grave, a-t-il déclaré. Elle est aussi inhabituelle par la façon très inégale dont elle frappe les entreprises et les particuliers ». Soulignant les inégalités de la reprise, M. Macklem a observé que les fermetures d’entreprises et les pertes d’emplois avaient été moins graves dans les secteurs où le télétravail est possible. Les secteurs des services, en revanche, ont été très durement touchés. Les femmes et les jeunes ont tendance à occuper des emplois à temps partiel moins bien rémunérés, dont les régimes d’avantages sociaux sont moins généreux.
La fermeture des écoles et des garderies a particulièrement touché les femmes, ce qui a fait ressortir l’importance de ces établissements pour la prochaine phase de la reprise économique. Les cas de COVID-19 ont commencé à augmenter lorsque les écoles ont rouvert leurs portes à l’échelle du Canada, faisant croître la probabilité qu’un retour des restrictions ou la fermeture de certains pans de l’économie soit inévitable.
Les actions canadiennes ont été à la traîne plus tôt cette année, mais ont affiché une bonne tenue au troisième trimestre en s’appréciant de 4,7 %. Leur performance a été tempérée par l’atonie du mois de septembre, pendant lequel une baisse de 2 % de l’indice composé S&P/TSX a été constatée. Le secteur de l’industrie s’est démarqué par sa vigueur et a été propulsé par des entreprises sensibles à la conjoncture économique comme celles des secteurs du transport et de la construction. La faiblesse des secteurs de l’énergie et de la santé a annulé une partie des gains. Le recul des prix du pétrole a nui au secteur de l’énergie.
États-Unis – Il est grand temps d’agir
À l’occasion de la plus récente réunion de politique monétaire de la Réserve fédérale (la Fed), le président Jerome Powell a confirmé que l’institution continuerait de soutenir l’économie en maintenant de faibles taux d’intérêt et en adoptant des programmes d’assouplissement quantitatif. Il a aussi exprimé son mécontentement à l’égard des législateurs, qui ont mis du temps à approuver la prochaine série de mesures de stimulation de l’économie américaine. Cette impasse a accentué la baisse des taux obligataires même s’ils étaient déjà proches de leurs creux records. Les cours obligataires ont par conséquent augmenté.
L’immobilisme entourant le projet de loi sur les mesures d’urgence a fortement plombé les actifs risqués. Les démocrates préconisent une série de mesures plus modestes, dont une seconde distribution de chèques aux Américains. Si ce projet de loi obtenait un appui bipartisan, il serait bénéfique pour un marché en proie à d’autres incertitudes.
Le chômage aux États-Unis est passé de 10,2 % en juillet à 8,4 % en août bien que la diminution du taux d’activité soit partiellement responsable de l’amélioration des statistiques. La valeur nette des Américains a connu une remontée rapide. Les prix des maisons et les marchés boursiers ont contribué à ramener l’actif des bilans des ménages américains aux niveaux prépandémiques. Les inégalités ont continué de faire problème, car les ménages à faible revenu n’ont pas bénéficié de cette remontée. Les dépenses de consommation resteront limitées dans ce segment de la population.
Les actions ont réagi négativement aux risques grandissants liés à trois enjeux : l’imminence de la présidentielle américaine, la recrudescence des cas de coronavirus aux États-Unis et l’incapacité des législateurs à convenir d’un projet de loi sur les mesures d’urgence. L’indice S&P 500 a perdu 3,8 % en septembre, soit la baisse mensuelle la plus prononcée depuis le décrochage causé par la COVID-19 en mars. Le très performant indice Nasdaq a cédé 5 % le mois dernier, mais a progressé dans l’ensemble de plus de 25 % en 2020. Malgré une fin de trimestre difficile, l’indice S&P 500 a gagné 9 % au troisième trimestre. L’indice composé Nasdaq a dominé les résultats enregistrés dans les marchés développés, grimpant de 11 % au troisième trimestre.
Europe et Royaume-Uni – À court de temps
L’Europe a continué d’être aux prises avec la hausse des cas de COVID-19 et le renforcement des mesures de restriction visant à maîtriser la propagation du virus. L’indice des directeurs d’achats européens du secteur des services (PMI) a touché un creux en quatre mois à cause du marasme de secteurs comme le tourisme, l’hôtellerie et la restauration.
Les actions européennes ont fait partie de celles qui ont accusé les rendements les plus faibles des pays développés, l’indice Euro Stoxx 50 ayant fléchi de 1 % au troisième trimestre. Les pays dans lesquels les cas de COVID-19 ont substantiellement augmenté (la France, l’Espagne et l’Italie, par exemple) ont dégagé des rendements anémiques. L’Allemagne a inscrit des rendements positifs parce que la propagation du virus semblait endiguée et la reprise de son économie a été stimulée par la forte relance de la Chine.
Dans un contexte de flambée du coronavirus, les négociations entourant le Brexit se sont poursuivies pour éviter un retrait chaotique du Royaume-Uni le 1er janvier 2021. Les tensions suscitées par le commerce avec l’Irlande du Nord se sont exacerbées. La livre britannique a continué de s’enfoncer dans la zone inférieure de sa fourchette de négociation sur cinq ans par rapport à l’euro.
Chine – L’heure de gloire
Tandis que le monde poursuit sa lutte contre la COVID-19, la Chine a adopté des mesures draconiennes et a réussi à contenir le virus. Le marché boursier chinois a réagi positivement et a marqué une avance de 9 % au troisième trimestre (selon l’indice composé de Shanghai). Le yuan chinois s’est nettement raffermi par rapport au dollar américain en raison de l’optimisme suscité par les perspectives économiques de la Chine et des taux d’intérêt comparativement élevés.
Au cours des derniers mois, les mesures de distanciation sociale ont été abolies, les enfants sont retournés à l’école dans un climat moins restrictif et les restaurants et les bars ont rouvert à leur pleine capacité. Devant ce constat, le FMI prévoit que la Chine sera l’une des rares grandes économies à bénéficier d’une croissance positive cette année. Les usines chinoises ont été parmi les premières à redémarrer à l’échelle mondiale de sorte que le secteur manufacturier a été le premier à stimuler le rebond de l’économie de la Chine. Des secteurs qui avaient été durement touchés, par exemple ceux des services et du commerce de détail, ont entrepris leur rattrapage.
Comme la reprise de la Chine gagne en vigueur, la banque centrale du pays a été la première à annoncer le resserrement de sa politique monétaire. L’institution renforcera les restrictions imposées au marché immobilier pour dissuader la spéculation.
Par contre, la poursuite de la reprise risque de se heurter à des obstacles, en particulier parce que les tensions géopolitiques sino-américaines ont repris de plus belle. Le président Trump a prétendu que TikTok, une application très en vogue aux États-Unis, représentait une menace pour la sécurité nationale parce que la société mère est chinoise. M. Trump a menacé d’interdire les téléchargements de cette application aux États-Unis. À l’heure actuelle, Oracle et Walmart s’emploient à trouver une solution pour sécuriser les données aux États-Unis et cherchent à obtenir les approbations des gouvernements tant américain que chinois.
Japon – Espoir à l’issue d’un troisième tour de piste
En pleine résurgence de la pandémie au mois d’août, le premier ministre japonais Shinzo Abe a annoncé sa démission pour des raisons de santé. Deux semaines plus tard, le Parti libéral-démocrate a désigné Yoshihide Suga, le secrétaire général du Cabinet, comme successeur de M. Abe.
Le nouveau premier ministre Suga a hérité d’une économie qui s’est contractée de 7,9 % entre avril et juin. Il s’agit de la pire contraction de l’après-guerre et du troisième trimestre consécutif de croissance négative. Le Japon a également déployé des mesures de relance budgétaires représentant environ 40 % du PIB en dépit du fait que le ratio de la dette publique au PIB atteignait déjà 230 % avant la pandémie.
Les espoirs de reprise sont élevés dans un contexte où la deuxième vague de COVID-19 semble maîtrisée. À la fin de septembre, les nouveaux cas avaient nettement diminué depuis le sommet atteint en août. La transmission étant concentrée chez les jeunes, il se peut que les systèmes de soins de santé ne soient pas submergés. La diminution des cas a contribué à stimuler les actions nippones; l’indice Nikkei s’est étoffé de 4,6 % au troisième trimestre.
Notre stratégie
Les marchés commencent à reconnaître les risques liés au résultat incertain de l’élection américaine et à la menace d’une deuxième vague de COVID-19. La reprise économique a été rapide au cours des derniers mois, mais la prochaine phase de la relance sera plus corsée. Son succès requiert une réouverture plus étendue des secteurs des voyages et des loisirs, mais il est improbable que ces derniers se redressent complètement avant qu’un vaccin soit disponible.
Notre scénario de référence repose sur l’hypothèse que la reprise ralentira au quatrième trimestre et que les taux d’intérêt se maintiendront à des niveaux historiquement bas. Par conséquent, les investisseurs en titres à revenu fixe obtiendront des rendements positifs très modestes à moins qu’ils ne consentent à prendre des risques. Les actions se buteront à des difficultés à court terme, mais continueront d’offrir des rendements relatifs plus intéressants à moyen terme. Notre position actuelle rend compte d’une exposition moindre au risque actions et d’une préférence moins marquée pour les actions américaines. Les perspectives des actions canadiennes sont meilleures en raison de la forte reprise économique nationale et de la vitalité du marché canadien de l’habitation.
Les risques pour le scénario de référence sont centrés sur les conséquences potentiellement désastreuses de l’élection américaine si le scrutin ne permet pas de désigner clairement le vainqueur de la course à la présidence. Un autre risque plane : le refus éventuel de M. Trump de concéder pacifiquement la victoire à son adversaire si celui-ci est élu.
Le mot de la fin
La nervosité de septembre transparaît dans la fragilité des marchés observée au quotidien. À l’échelle mondiale, la recrudescence prévue des cas de coronavirus se confirme, entraînant dans son sillage une deuxième vague très redoutée. Nous sommes à un point de basculement, car nos actes collectifs détermineront la forme que prendra la courbe et, ce faisant, les perspectives économiques. Comme l’explique Malcolm Gladwell dans son livre Le Point de bascule, le paradoxe des phénomènes de contagion est qu’il faut souvent créer de petits élans pour lancer un grand mouvement.
Les renseignements contenus dans la présente publication sont fondés sur des sources comme les rapports des émetteurs, les services statistiques et les communications d’entreprise.
Nous les estimons fiables sans toutefois en garantir l’exactitude ni l’exhaustivité. Les opinions exprimées dans cette publication sont purement ponctuelles et peuvent changer en tout temps. BMO Gestion privée n’est pas responsable des pertes pouvant découler de l’utilisation du présent commentaire ou de son contenu. Les informations, opinions, prévisions, projections et autres éléments contenus dans le document ne doivent pas être considérés comme une offre de vente, une sollicitation ou une offre d’achat de produits ou de services qui y sont mentionnés (y compris de marchandises, de titres ou autres instruments financiers), et ces informations, opinions, prévisions, projections et autres éléments ne doivent pas être considérés comme un conseil en matière de placement ou de fiscalité, ou comme une recommandation quant à la conclusion d’une quelconque opération, ni comme une assurance ou une garantie en ce qui concerne les résultats d’une quelconque opération.
Vous ne devriez pas agir sur la foi des renseignements de cette publication, ni vous y fier sans avoir obtenu les conseils d’un professionnel compétent.
BMO Gestion privée est un nom de marque du groupe d’exploitation qui comprend la Banque de Montréal et certaines de ses sociétés affiliées qui offrent des produits et des services de gestion privée. Les produits et les services ne sont pas tous offerts par toutes les entités juridiques au sein de BMO Gestion privée. Les services bancaires sont offerts par l’entremise de la Banque de Montréal. Les services de gestion de placements, de planification de patrimoine, de planification fiscale et de planification philanthropique sont offerts par BMO Nesbitt Burns Inc. et BMO Gestion privée de placements Inc. Les services de garde de valeurs ainsi que les services successoraux et fiduciaires sont offerts par la Société de fiducie BMO. Les services et les produits d’assurance sont offerts par l’intermédiaire de BMO Services conseils en assurances et planification successorale Inc., une filiale en propriété exclusive de BMO Nesbitt Burns Inc. Les entités juridiques de BMO Gestion privée n’offrent pas de conseils fiscaux. La Société de fiducie BMO et BMO Banque de Montréal sont membres de la Société d’assurance-dépôts du Canada