Le fil conducteur : Au cours de la fin de semaine, il a été annoncé que le président américain, Donald Trump, avait l’intention d’instaurer un tarif général de 25 % sur tous les produits importés du Mexique et un tarif semblable de 25 % sur toutes les importations en provenance du Canada, à l’exception de l’énergie, dont le tarif sera de 10 %. Un tarif de 10 % supplémentaire sur toutes les importations chinoises a également été annoncé. Bien que le recours aux tarifs ait été une promesse fréquente de la campagne électorale, les appliquer à tous les produits – et à deux partenaires commerciaux principaux – a été une surprise. Les marchés des actions, des titres à revenu fixe, des produits de base et des devises devraient réagir fortement au cours des prochains jours, des négociations de dernière minute sont demandées et des contretarifs sont annoncés. La situation demeure très instable et nous vous encourageons à faire preuve de patience et de calme à mesure que nous en apprendrons plus.
Et les guerres commerciales commencent
Personne ne gagne dans une guerre commerciale. Cela est devenu axiomatique dans les cercles économiques et financiers au cours du dernier siècle pour de bonnes raisons : les tarifs peuvent faire baisser la croissance économique et faire augmenter les prix, deux résultats indésirables qui pourraient avoir des répercussions sur les trois économies nord-américaines (et sur plusieurs autres) à des degrés divers si les tarifs qui ont été annoncés par le nouveau président américain, Donald Trump, au cours de la fin de semaine deviennent réalité.
Samedi, le président Trump a signé un décret imposant des tarifs douaniers de 25 % sur les produits en provenance du Mexique et du Canada et de 10 % sur les importations chinoises, qui devraient entrer en vigueur le 4 février. Les ressources énergétiques du Canada seront assujetties à un tarif moins élevé de 10 % probablement pour contenir les pressions inflationnistes liées à l’essence et au mazout de chauffage. Comme prévu, le Canada a immédiatement annoncé des mesures de rétorsion. (Pour ceux qui aiment le vin et le bourbon américains, lundi pourrait être une bonne journée pour faire provision.)
En cas de guerre commerciale prolongée – laquelle n’est pas inévitable puisque le président Trump s’est rapidement ravisé à plusieurs reprises par le passé –, le Canada et le Mexique pourraient voir une incidence importante sur la croissance du PIB cette année. Par ailleurs, les consommateurs américains pourraient théoriquement absorber les coûts plus élevés dans la mesure où ils sont répercutés sur eux. La situation est difficile en raison des récentes révoltes liées à la hausse des prix. Les importateurs, les fabricants ou d’autres intervenants de la chaîne de distribution, par exemple, pourraient absorber les droits d’importation dans leurs marges, au lieu de les répercuter directement sur les consommateurs. Dans certains secteurs (automobile, distribution alimentaire), les marges des distributeurs sont minces, et les coûts pourraient en effet être répercutés sur les consommateurs, même si l’augmentation du prix unitaire final varie.
Pas des tarifs ordinaires
Il est important de noter la nuance de ces tarifs : ils ont été édictés par le président Trump en vertu de l’International Emergency Economic Powers Act (IEEPA) et ne sont pas à proprement parler des tarifs douaniers fondés sur le commerce. Ils ont pour objet de mettre fin à l’immigration illégale et à la consommation de fentanyl en provenance du Mexique et du Canada. Comme les tarifs généraux constituent une application singulière et largement invérifiée de l’IEEPA, il pourrait y avoir des poursuites judiciaires de la part de divers groupes sectoriels qui contestent l’absence de lien direct entre leur évaluation et les enjeux soulevés (drogues et immigration illégales).
Comment les marchés réagiront-ils?
Les tarifs devraient entrer en vigueur à 00 h 01 HNE mardi, peut-être pour permettre d’évaluer la réponse du marché lundi. Le président Trump se soucie de la réaction de sa base et de la façon dont le marché réagit à ses politiques. Si les marchés poursuivent le repli amorcé vendredi après-midi ou si les pressions des lobbyistes sectoriels s’intensifient, peut-être qu’une solution de compromis pourrait être trouvée. L’attaché de presse du président Trump a souligné vendredi après-midi que les tarifs, tout comme bon nombre d’autres mesures prises dès le départ par l’administration, font partie des « promesses faites, promesses tenues » de la campagne électorale.
À ce stade-ci, nous nous attendons à une réaction négative initiale à l’égard des actifs à risque, et en particulier des actions.
Bien que les sociétés ouvertes canadiennes inscrites à la Bourse de Toronto tirent environ un tiers de leurs revenus des États-Unis, la part des ventes provenant des produits par rapport aux services est en fait beaucoup plus petite. Au bout du compte, les secteurs de l’acier et de l’aluminium, des produits chimiques, de l’aérospatiale, des pièces automobiles, de la machinerie, du vêtement, de l’agriculture et de la foresterie semblent être les plus directement exposés. Les sociétés pétrolières et gazières seront touchées, mais suivant un taux tarifaire moins élevé, du moins au début.
Quelles sont les perspectives pour l’économie canadienne?
En réponse à l’annonce des tarifs, l’équipe Études économiques BMO a révisé ses estimations de la croissance du PIB et de divers autres indicateurs. Compte tenu bien sûr du manque d’information à ce stade-ci (et en supposant leur abolition après un an), il a été estimé que les tarifs réduiront la croissance du PIB réel d’environ 2 % pour atteindre environ zéro en 2025. Ce chiffre tient compte de la baisse de la demande pour les exportations canadiennes vers les États-Unis (qui représentent environ le cinquième du PIB), des perturbations sur les chaînes d’approvisionnement qui nuisent à l’activité et à la consommation des entreprises et de l’incertitude accrue qui réduit les investissements des entreprises. Il tient également compte de la réduction de la demande intérieure en raison de la hausse des prix découlant des tarifs de rétorsion et de la dépréciation du dollar canadien. Sur une note un peu plus positive, les pressions inflationnistes devraient demeurer modérées, ce qui devrait permettre un certain ralentissement en 2026.
La faiblesse de la devise, la baisse des taux d’intérêt et un programme d’aide financière du gouvernement pour les travailleurs sans emploi et les entreprises touchées atténueront en partie les difficultés économiques. Ces facteurs devraient entraîner une modeste reprise de la croissance du PIB réel, qui devrait atteindre environ 1 % en 2026. Dans l’ensemble, l’équipe s’attend à ce que les répercussions économiques touchent le plus durement l’Ontario et le reste du centre du Canada, tout en perturbant considérablement certaines industries concentrées du Canada atlantique et de la Colombie-Britannique et dans une moindre mesure pour l’instant les provinces productrices de pétrole.
Répercussions sur les actifs importants
Dollar canadien – Le dollar canadien s’est déjà déprécié d’environ 10 % depuis janvier 2024. L’équipe Études économiques BMO prévoit un taux de 1,49 $ CA d’ici l’automne. Cette dépréciation aidera à compenser une partie de l’incidence des tarifs pour permettre aux exportateurs canadiens de réduire les prix, puisqu’ils obtiendront plus de dollars canadiens après la conversion des dollars américains reçus.
Actions – Les tarifs sont une taxe et un frein à la croissance économique, l’incertitude qui en résulte pouvant avoir une incidence sur l’« instinct » du capitalisme. Pour les investisseurs, l’analyse des répercussions combinées sur les bénéfices des sociétés est essentielle. Il y a beaucoup trop d’inconnues pour tirer des conclusions, mais, d’une façon directionnelle, l’incidence est négative et les marchés boursiers mondiaux devraient ouvrir à environ 2 % le 3 février. Toutefois, les marchés boursiers mondiaux entrent dans cette période d’incertitude avec une assise décente. Les prévisions de croissance des bénéfices sont solides et les données récentes sont étonnamment à la hausse dans une grande partie du monde. Les valorisations sur les marchés boursiers autres que ceux des États-Unis ne sont pas trop onéreuses, certaines sont assez faibles (Chine).
Les tarifs sont une perturbation, et les perturbations sont le mot d’ordre depuis cinq ans ou plus. Les sociétés sont devenues très habiles à relever les défis, en particulier ceux de la chaîne d’approvisionnement, notamment la guerre commerciale de 2018, les fermetures liées à la pandémie de COVID-19 et la réouverture, ainsi que la guerre en Ukraine. Ajoutons à cela les fissures dans le système bancaire américain (faillite de la Silicon Valley Bank), la hausse et le repli de l’inflation, ainsi qu’un cycle coordonné de resserrement par les banques centrales mondiales. Tout cela a permis aux entreprises de se renforcer, d’être plus résilientes et d’être encore plus en mesure de relever ce nouveau défi.
Obligations – Nous nous attendons à ce que les taux obligataires diminuent à mesure que la demande augmente en raison de leur statut perçu de placement refuge, de leur attrait relatif dans un contexte de ralentissement économique et des attentes à l’égard des mesures d’assouplissement accrues de la Banque du Canada.
Miser sur la diversification
La discipline, la patience et l’équilibre sont essentiels pour traverser les périodes d’incertitude et de volatilité accrues des marchés. Les investisseurs bien diversifiés doivent se rappeler le rôle que jouent divers actifs dans leurs portefeuilles, eu égard aux circonstances actuelles. Vous trouverez ci-dessous d’autres façons de réfléchir à la création d’une résilience dans vos placements.
• L’exposition aux actions américaines entraîne une exposition au dollar américain. Les placements demeurent attrayants en soi, avec l’avantage supplémentaire d’une compensation de la devise pour les investisseurs canadiens à l’heure où le dollar canadien est sous pression.
• Le marché boursier canadien n’est pas l’économie canadienne. Des menaces tarifaires visent des segments comme l’acier, les produits forestiers, les produits alimentaires et les pièces d’automobiles. Ce sont des segments importants pour l’économie canadienne, mais leur poids sur le marché boursier canadien est minime. L’ensemble de ces segments ne compte que pour moins de 5 % de l’indice S&P/TSX. Les segments les plus importants sont ceux des métaux et des mines, de l’énergie et des services financiers, qui occupent respectivement une part de 12 %, de 17 % et de 33 % de l’indice. Les entreprises du secteur des ressources entrevoient des répercussions tarifaires plus légères, et les services financiers n’en subiront aucune.
• Même les entreprises canadiennes dans les secteurs assujettis à des tarifs ont des usines, des installations et des activités importantes aux États-Unis, aucune n’y étant assujettie à des tarifs.
• Nous prévoyons une baisse des taux des obligations canadiennes à moyen et à long terme, ce qui entraînera une appréciation du cours des positions obligataires de grande qualité. C’est le rôle que jouent ces obligations dans les portefeuilles équilibrés.
En résumé
Comme nous l’avons mentionné dans Stratégique hebdomadaire – Perspectives (Stratégie hebdomadaire – Perspectives :Composer avec la volatilité - BMO Gestion privée), les marchés boursiers ont une capacité historique à résister aux chocs externes, notamment les guerres, les actes terroristes, les pandémies et d’autres calamités économiques. Il faut s’attendre à de vives réactions à court terme, car les nouvelles informations sont prises en compte dans les évaluations et les perspectives, mais il est important de ne pas laisser la peur ou les émotions influencer la prise de décisions.
Nous vous conseillons de rester calme – les réactions de panique et impulsives à toute catastrophe du marché ne sont jamais le meilleur comportement à adopter. C’est encore plus le cas si l’on tient compte du niveau d’incertitude, du rythme et de l’instabilité de la situation actuelle.
Comme toujours, le maintien d’un portefeuille bien diversifié dans l’ensemble des catégories d’actif, des secteurs et des émetteurs individuels est la meilleure défense contre les épisodes de volatilité des marchés. Veuillez communiquer avec votre conseiller de BMO Gestion privée si vous avez des questions, et pour discuter de votre portefeuille et de titres particuliers.
Déclaration générale
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