« Non, non. Vous m’avez forcé à lui rendre visite l’an dernier et vous m’aviez promis que, si j’allais le voir, il marierait l’une de mes filles. Mais cela ne s’est pas produit et je ne me ferai plus prendre pour un idiot. »
– M. Bennet, Orgueil et préjugés de Jane Austen
Le mois de juillet a été marqué par un retour à la normale bienvenu, les liquidités, les obligations et une grande variété d’actions ayant alimenté les résultats. Les investisseurs qui ont un portefeuille bien diversifié ont été les grands gagnants du mois. Ainsi, notre stratégie et nos portefeuilles ont donné d’excellents résultats.
La politique, la géopolitique, l’inflation, la croissance économique, la politique monétaire et les bénéfices des sociétés sont autant de facteurs qui ont eu une incidence sur les marchés financiers. La diversification comporte des avantages évidents, surtout lorsque les marchés sont soumis à des turbulences provenant de toute part. Une divergence importante a été observée entre les marchés boursiers régionaux et sur le plan de la taille (ou de la capitalisation boursière) des sociétés.
Bien qu’elle ait fait couler beaucoup d’encre, l’évolution du paysage des élections américaines de 2024 n’a pas été le principal moteur des changements sur les marchés financiers. La politique et la géopolitique peuvent influer sur les marchés à court terme et en marge, mais ultimement, l’économie l’emporte sur n’importe quel individu ou parti. Nous observons d’autres preuves que ce sont les données fondamentales qui ont dicté l’allure des marchés.
Un marché dicté par les données fondamentales et non par la politique
Nous entendons beaucoup parler du soi-disant effet Trump sur le marché, qui se définit comme une réaction du marché ou des investisseurs aux politiques ou aux promesses favorables aux entreprises si Trump est élu une deuxième fois à la présidence (p. ex., un assouplissement de la réglementation, un plus grand protectionnisme, mais peut-être une inflation plus élevée). Comme élément de preuve de l’effet de Trump ou de Harris sur les marchés, certains évoquent la faiblesse des actions en Chine, au Japon et en Europe ou la rotation vers les sociétés américaines à petite et moyenne capitalisation. Pourtant, ce sont les données fondamentales et non la politique qui, à notre avis, sont à l’origine de ces mouvements.
Les actions autres qu’américaines réagissent probablement aux tarifs douaniers qui pourraient être imposés (promis par Trump, mais généralement aussi prisés par les démocrates). Néanmoins, l’Europe doit composer avec ses propres problèmes : même si la zone euro est en croissance, l’Allemagne, le moteur économique de la région, stagne. L’inflation reste obstinément élevée, ce qui complique la tâche de la Banque centrale européenne, car l’économie a besoin de réductions de taux, ce qui sera difficile à faire tant que l’inflation sera élevée. Au Royaume-Uni, la croissance économique a été plus vigoureuse que prévu et la Banque d’Angleterre s’est jointe aux autres banques centrales qui ont réduit les taux d’intérêt. En juillet, l’indice boursier européen Stoxx 50 a reculé de 0,4 %, alors que l’indice FTSE 100 du Royaume-Uni a progressé de 2,5 %.
La politique de la Banque du Japon va à l’encontre de la tendance aux réductions des taux (ce qui n’est pas étonnant puisqu’ils sont près de zéro). De plus, les marchés boursiers japonais, fortement tributaires des exportations, sont victimes de la hausse des taux d’intérêt japonais et d’une appréciation du yen. L’indice boursier japonais Nikkei 225 a fléchi de 1,2 %. Pour les investisseurs étrangers, la forte appréciation du yen a poussé le rendement du Nikkei en territoire nettement positif pour le porter à 5,5 % en dollars américains.
La situation demeure difficile en Chine et ne montre que peu d’amélioration, ce qui a incité Beijing à déployer une autre série de mesures d’aide monétaire et budgétaire. Ces mesures ne réussiront pas à relancer l’économie, mais elles devraient la stabiliser suffisamment pour éviter qu’elle ne devienne une menace pour la croissance mondiale. Il s’agit d’une approche que Beijing suit depuis plusieurs années. Ici, la politique occupe une place plus importante, et les tarifs douaniers imposés à la Chine sont susceptibles d’être maintenus ou augmentés, peu importe qui occupe le 1600 Pennsylvania Avenue. En juillet, l’indice des actions MSCI China a reculé de 2,2 % et l’indice MSCI Marchés émergents ($ US), de 0,1 %.
Les actions canadiennes ont mené le bal en juillet, de toute évidence imperturbables aux événements se produisant sur la scène politique, et ce, malgré les rumeurs entourant l’imposition généralisée de tarifs douaniers par les États-Unis ou la révision prévue de l’AEUMC qui aura lieu avec un nouveau gouvernement à Washington. Elles ont plutôt réagi aux données fondamentales, à savoir à la baisse de l’inflation au Canada, à la croissance du PIB qui a été supérieure aux attentes et aux deux réductions de taux en deux mois par la banque centrale, qui en a annoncé d’autres. Soulignons que la remontée de l’indice S&P/TSX a été généralisée, à l’opposé de celle de l’indice S&P 500, du moins jusqu’à tout récemment. Pour chaque titre de l’indice S&P/TSX qui a reculé, deux ont progressé depuis le début de l’année, ce qui indique que la remontée est solide. Le rendement de 5,7 % enregistré par l’indice S&P/TSX en juillet a fait doubler le rendement cumulé depuis le début de l’année qui a atteint 10,3 %.
Puissante rotation des actions à petite capitalisation
Le fait saillant des marchés boursiers a été la remontée vigoureuse des actions de sociétés à petite et moyenne capitalisation. Profitant des valorisations élevées des actions de sociétés à très grande capitalisation et des entreprises d’IA, les investisseurs ont vendu ces titres pour financer des achats d’actions d’autres sociétés moins prisées du marché depuis le début de l’année. L’amélioration sur le plan de l’inflation (ralentissement) aux États-Unis a déclenché la remontée. Ainsi, l’espoir que la Réserve fédérale américaine puisse bientôt baisser les taux d’intérêt, peut-être de 0,75 % cette année, a été ravivé.
L’indice Russell 2000 a bondi de 10,1 % en juillet, comparativement à une hausse de 1,1 % pour l’indice S&P 500, alors que la version équipondérée de l’indice S&P 500, qui représente le marché dans son ensemble, a progressé de 4,4 %. Cette rotation constitue une évolution très saine qui contribue à atténuer l’enthousiasme à l’égard des sociétés à grande capitalisation axées sur l’IA dont le cours a beaucoup augmenté en peu de temps. À l’opposé, l’indice Russell 2000 des sociétés à petite capitalisation se négociait au niveau le plus bas par rapport à l’indice S&P 500 depuis 1999.
L’importance des bénéfices
En plus des pressions de vente qui ont pesé sur les sociétés technologiques à grande capitalisation, les perspectives de bénéfices ont été décevantes du côté de Tesla, d’Alphabet, de Microsoft et d’Amazon. Certes, certaines d’entre elles ont enregistré des bénéfices inférieurs aux attentes, mais d’autres ont été parfois pénalisées pour avoir simplement répondu aux attentes. Des questions sont soulevées quant aux sommes que les entreprises consacrent à la recherche sur l’IA et à son déploiement, par rapport aux revenus que ces investissements pourraient générer et au moment où cela pourrait se concrétiser.
Outre les bénéfices décevants de certaines sociétés à très grande capitalisation qui ont plombé le cours de leurs actions, la période de publication des bénéfices s’est généralement bien déroulée. Les principales prévisions de bénéfices du marché (qui affichaient une tendance à la hausse) tiennent toujours pour cette année et l’an prochain. Certaines sociétés sont évaluées de manière très optimiste et sont pénalisées pour des résultats légèrement sous les prévisions. D’autres sociétés – qui ont satisfait ou surpassé les attentes, et dont les titres offraient une meilleure valeur – ont vu le cours de leurs actions récompensé; voilà précisément comment les choses devraient se dérouler dans un système capitaliste.
Le scénario idéal est toujours à notre portée
Si l’on observe l’activité du marché en juillet, on constate que notre scénario de référence, qui est un scénario idéal d’atterrissage en douceur où la croissance économique n’est ni trop forte (inflationniste) ni trop faible (en récession), se tient. Le rendement inégalé des petites capitalisations par rapport à celui des grandes capitalisations depuis 2001 s’explique de deux façons. La pondération des grandes capitalisations a été réduite dans les portefeuilles, car leurs évaluations étaient trop élevées et leurs bénéfices, moins généreux que prévu. Par ailleurs, les petites capitalisations se sont redressées parce que le scénario économique idéal laisse présager un allègement de leur fardeau lié aux taux d’intérêt sans qu’un ralentissement majeur de l’économie se produise. Ce qu’il faut retenir, c’est que si le scénario idéal était hors de notre portée, les petites sociétés plus risquées ne se redresseraient pas. La rotation ainsi que la participation plus large à l’ensemble des régions et de la capitalisation boursière qui ont eu lieu en juillet renforcent notre optimisme à l’égard des actifs à risque à moyen terme.
Début cahoteux en août
Comme l’inflation est repartie à la baisse, il est normal de voir les taux obligataires diminuer à mesure que les attentes de réductions de taux par la banque centrale augmentent. Or, les taux obligataires ont plongé rapidement à la fin de juillet et lors des premiers jours d’août. Même si de nombreux signes laissent encore présager un avenir idyllique, lorsque les banques centrales tentent délibérément depuis deux ans de ralentir les économies pour endiguer l’inflation, la question qui nous vient naturellement est la suivante : à partir de quel moment faut-il s’inquiéter de la faiblesse des données?
Au début d’août, les perspectives du secteur manufacturier se sont révélées décevantes à l’échelle mondiale, et le marché américain du travail a montré qu’il ralentissait plus rapidement que prévu. Les taux obligataires s’approchent de niveaux où il est normal de se demander si le marché obligataire s’inquiète d’une baisse de l’inflation ou d’un ralentissement excessif de la croissance. Nous continuons d’observer assez de preuves nous montrant que la croissance ralentit, mais ne s’effondre pas aux États-Unis, et que la croissance à l’extérieur des États-Unis est faible, mais qu’elle rebondit, bien que des risques subsistent.
Les corrections sur les marchés boursiers font partie de la normalité des placements. Il est réjouissant de constater que certains segments surévalués se sont affaiblis et que d’autres ont pris de la vigueur. Toutefois, nous traversons la période de l’année qui se caractérise par de la volatilité, une participation réduite et de faibles liquidités, de sorte que d’autres fluctuations pourraient survenir. En effet, les marchés boursiers mondiaux ont commencé le mois d’août dans le rouge. Compte tenu du progrès réalisé par les actions, de la faiblesse saisonnière des marchés et des failles qui commencent à cisailler l’immense économie américaine, une certaine baisse n’est ni inhabituelle ni inattendue. Ainsi, il vaut mieux rester calme et éviter les réactions exagérées.
Notre stratégie : Équilibrée, avec une préférence pour les actions
Nous surpondérons les actions, en particulier celles du Canada et des États-Unis. Nous accordons une pondération neutre aux marchés développés internationaux (Europe et Japon) et nous sous-pondérons les marchés boursiers émergents. Dans la composante des titres à revenu fixe, nous surpondérons les obligations de sociétés de catégorie investissement et sous-pondérons les emprunteurs de qualité inférieure dans le segment des titres à rendement élevé.
Tout au long de l’année, notre discipline nous a conduits à vendre des actions qui s’étaient appréciées afin d’étoffer nos positions dans les obligations si la peur concernant la croissance venait s’emparer des marchés. La peur s’est sans doute déjà immiscée. Le rendement de 2,4 % enregistré par l’indice des obligations universelles FTSE Canada en juillet est une preuve que notre approche est prudente.
Dans les portefeuilles où les fluctuations du marché ont entraîné des écarts entre les pondérations régionales des actions par rapport aux cibles, nous avons procédé à un rééquilibrage des placements en vendant des actions américaines et en achetant des actions canadiennes. En juillet, les changements les plus importants ont été apportés à nos portefeuilles axés sur la croissance. Ainsi, nous avons réduit le poids des actions américaines à petite capitalisation pour profiter de leur récente vigueur, tout en y conservant une forte pondération. Les actions à petite capitalisation peuvent ajouter de la valeur au fil du temps, mais elles constituent une catégorie d’actif plus volatile. De plus, même si les valorisations y sont attrayantes, elles ne sont pas toutes bon marché. On peut penser qu’il existe une bonne raison pour laquelle les actions à petite capitalisation présentent un rendement inférieur et sont bon marché. Dans l’ensemble, les sociétés à petite capitalisation présentent une croissance des bénéfices inférieure à celle des sociétés à grande capitalisation, leurs marges bénéficiaires sont plus faibles et la catégorie renferme une multitude d’entreprises non rentables et lourdement endettées.
Les actions à petite capitalisation s’apparentent un peu aux ligues mineures dans lesquelles la carrière de certains joueurs est en progression, alors qu’elle est en déclin pour d’autres. Il faut donc être prêts à y faire une sélection active de titres. Nous comptons exclusivement sur des gestionnaires de portefeuille spécialisés, attitrés et actifs dans le segment des sociétés à petite capitalisation, qui cherchent d’abord et avant tout les titres de qualité. La qualité constitue un atout, qui permet aux gestionnaires de limiter les pertes par rapport à l’indice qui contient un peu de tout et n’importe quoi. Il s’agit d’une stratégie de contrôle des risques.
Le mot de la fin : Ne mêlez pas la politique à votre portefeuille
Il vaut mieux ne pas mêler la politique au processus de placement. La politique peut avoir une incidence sur certaines sociétés ou sur certains secteurs précis, mais une multitude de preuves indiquent que les économies américaine et mondiale évoluent en dépit de la personne qui occupe le bureau ovale.
Si l’on remonte jusqu’à Teddy Roosevelt en 1901, on peut diviser presque également les 28 mandats présidentiels entre les démocrates (15) et les républicains (13) au cours desquels les rendements ont été positifs. Le rendement total du marché boursier américain n’a pas été positif (taux d’échec de 20 %) seulement au cours de sept mandats présidentiels, dont deux du côté des démocrates, et cinq du côté des républicains. Le taux d’échec de 20 % reflète le comportement du marché boursier à long terme. De fait, le marché boursier américain enregistre un rendement annuel positif plus de 70 % du temps. Ce sont les événements économiques, et non politiques, qui dictent à long terme l’allure des marchés boursiers.
Même si les sondages sont reconnus pour leur manque de fiabilité, les deux adversaires à la présidentielle semblent à égalité. Les promesses des politiciens, en particulier celles formulées pendant la campagne électorale, doivent être prises avec un grain de sel. Aucun des deux candidats n’a présenté un programme de politique cohérent. Les candidats aiment tenir des discours, mais ceux-ci ont souvent peu à voir avec ce qui peut être concrètement réalisé. Méfiez-vous de ceux qui établissent des liens entre les discours politiques et les fluctuations des marchés financiers.
La capacité à mettre en oeuvre les politiques annoncées dépend de la composition du Congrès. Les deux candidats vont se buter à des groupes de résistance au sein même de leur parti, sans compter ceux qui font partie du camp des modérés. Les deux candidats doivent composer avec le déficit le plus élevé en temps de paix de l’histoire en fonction du pourcentage du PIB et avec un service de la dette en pourcentage des revenus du gouvernement qui est à un sommet de plus de 40 ans. Cette réalité limitera ce qu’ils pourront faire. Les réactions du marché sont souvent de courte durée et sont occultées par l’ensemble du cycle économique.
Comme les événements politiques produisent des résultats binaires, vous devez voir plusieurs de vos prédictions se réaliser pour pouvoir éventuellement en profiter. Vous devez prévoir le résultat ainsi que la réaction du marché. L’histoire récente regorge d’exemples où les prédictions se sont révélées fausses. Il y a bien eu un Brexit, mais les actions du Royaume-Uni se sont ensuite appréciées. Lorsque Donald Trump a battu Hillary Clinton, les démocrates prédisaient que son mandat serait catastrophique pour l’économie et le marché boursier; les républicains ont dit la même chose au sujet des mandats d’Obama et de Biden. Durant tous ces mandats, l’économie a progressé; le marché boursier a certes connu des soubresauts, mais il a progressé.
Il est risqué de prédire les résultats politiques, alors que l’exercice ne procure que peu d’avantages. Nous ne sommes pas dupes et nous ne laisserons pas notre expérience, notre processus et notre rigueur de côté. Nous allons suivre l’exemple du personnage de M. Bennet créé par Jane Austen et éviter de nous faire prendre pour des idiots.
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