Liquidité – nom : fonds disponibles en argent et non investis dans des placements ou des biens, ou qui peuvent être convertis facilement en argent
– Traduction libre de la définition du Cambridge Business English Dictionary
Si vous revenez d’une longue pause estivale pour examiner les résultats des mois de juillet et d’août, vous serez heureux de constater que la plupart des marchés boursiers ont progressé d’environ 5 % et que l’indice des obligations universelles FTSE Canada a enregistré une solide hausse de 2,7 %.
La situation du marché est positive, bienvenue et conforme à notre scénario de référence qui table sur une normalisation de l’économie mondiale. La conjoncture économique mondiale se caractérise par le fait que l’inflation n’est plus la principale préoccupation, l’économie américaine ralentit comme souhaité et l’activité est sur le point de reprendre dans le reste du monde, car de nombreuses banques centrales sont pleinement engagées dans l’assouplissement de leur politique monétaire.
Le marché obligataire reflète ce scénario, et les obligations se négocient à leur juste valeur. Les marchés boursiers ont intégré en partie cette situation encourageante; de plus en plus de régions et de sociétés inscrivent des gains et participent à la remontée. Si vous vous intéressez uniquement au portrait qui aurait pu être brossé en date du 31 août, vous pouvez passer au prochain chapitre. Si vous souhaitez prolonger votre bonheur estival, vous devriez éviter de lire la suite.
Cependant, comme la plupart des investisseurs, nous n’avons pas complètement décroché durant l’été. Nous avons été témoins des culbutes estivales des marchés entre la mi-juillet et la mi-août. Tels des athlètes olympiques et paralympiques, les marchés financiers ont réussi leur atterrissage. Le reste du présent commentaire traitera des raisons qui expliquent la dégringolade des marchés, des éléments qu’il faut en retenir et des facteurs qui ont exacerbé la situation.
Détérioration des données économiques
Au cours des deux dernières années et demie, le resserrement de la politique monétaire visait à ralentir délibérément l’activité économique et à faire baisser l’inflation. Comme l’on pouvait s’y attendre, les investisseurs sont maintenant aux aguets de toute faiblesse de l’économie qui pourrait entraver la croissance des bénéfices des sociétés, qui a été malmenée en 2022 et en 2023 et qui commence tout juste à s’étendre à l’ensemble des secteurs.
Lors des deux premières journées du mois d’août, des données décevantes sur le secteur manufacturier américain ont été publiées et le rapport sur le marché de l’emploi aux États-Unis s’est révélé inférieur aux attentes (sans être faible), ce qui a avivé les craintes de récession. Deux bémols doivent toutefois être apportés : le rapport sur l’emploi tient compte des perturbations causées par l’ouragan Beryl et la hausse du taux de chômage est attribuable à l’augmentation du nombre de personnes à la recherche d’un emploi et non à des pertes d’emplois. Même si les données sur le chômage ne sont pas reluisantes, ces éléments nous indiquent que nous ne sommes pas dans une situation où des mises à pied à grande échelle provoqueraient une baisse incontrôlable des dépenses comme ce qui est normalement observé en période de récession. Le 5 août, la publication de données sur le secteur américain des services (beaucoup plus important que celui de la fabrication) se sont révélées rassurantes.
Les indicateurs de la consommation des ménages (qui représente plus des deux tiers de l’activité économique américaine) ont été mitigés. De grands détaillants ont annoncé qu’ils éprouvaient certaines difficultés, en particulier dans les secteurs de la restauration et de la rénovation. En revanche, d’autres détaillants ont montré leur résilience, à l’instar de l’ensemble des dépenses dans le commerce de détail.
Plusieurs de ces thèmes ont aussi été observés au Canada : ralentissement de l’inflation, faiblesse des données sur l’emploi, et ventes au détail anémiques. La perception selon laquelle l’économie du Canada est en surchauffe est révolue depuis longtemps et c’est pourquoi la Banque du Canada a commencé à baisser les taux il y a trois mois. Comme c’est le cas dans les autres pays, sauf aux États-Unis, l’économie canadienne frôle la récession depuis deux ans. Même si elle a donné certains signes de vigueur récemment, les baisses de taux devront se succéder pour qu’elle puisse conserver son élan.
Les Études économiques BMO prévoient trois réductions de taux supplémentaires de 0,25 % d’ici janvier, puis une autre de 0,5 % d’ici le milieu de 2025, ce qui ferait baisser le taux de financement à un jour à 3,0 % d’ici juin prochain.
Cette perspective a fait fléchir les taux de rendement des obligations; l’indice des obligations universelles FTSE Canada a inscrit un rendement de 0,3 % en août. Notre huard s’est envolé durant le mois et s’est apprécié de plus d’un cent pour atteindre 0,741 $ US ou 1,349 $ CA.
Pour la suite, nous entrevoyons une croissance des salaires, une baisse de l’inflation et, tôt ou tard, des coûts d’emprunt moins élevés, ce qui générera des gains de revenu réels qui feront en sorte que les consommateurs continueront de dépenser.
Bénéfices en désordre
Les investisseurs commencent à ressentir la pression de vendre leurs titres, surtout ceux des sociétés technologiques à grande capitalisation. Les perspectives de bénéfices décevantes de Tesla, d’Alphabet, de Microsoft, d’Amazon et d’Intel ont poussé les investisseurs à s’interroger sur les valorisations de ces titres et sur la durabilité de la thématique de l’intelligence artificielle. Ils se demandent si les milliards de dollars que les sept magnifiques consacrent à la recherche sur l’IA et à son déploiement porteront leurs fruits de sitôt. Bon nombre de ces entreprises sont fortement représentées dans l’indice Nasdaq, qui a progressé d’environ 25 % depuis le début de l’année, mais qui a reculé de 13 % par rapport à son sommet du 10 juillet. L’indice a depuis récupéré un peu plus de la moitié du terrain perdu, un coup de semonce pour les investisseurs complaisants. La baisse de l’indice S&P 500 était inférieure à 10 %.
Outre les bénéfices décevants de certaines mégacapitalisations, la période de publication des bénéfices s’est plutôt bien déroulée et les perspectives demeurent favorables. Il a été d’ailleurs possible d’en faire le constat dans les marchés moins exposés aux sociétés à très grande capitalisation. Pour l’indice équipondéré S&P 500, l’indice Dow Jones des valeurs industrielles et l’indice composé S&P/TSX, les baisses ont été de l’ordre de 5 % à 6 %, ce qui est deux fois moins que l’indice Nasdaq, qui est très performant, et des fluctuations ordinaires sur les marchés boursiers. Tous ces marchés se sont complètement redressés, et l’indice S&P 500 est tout près de franchir un nouveau sommet.
Voici un condensé du mois d’août : l’indice composé S&P/TSX a progressé de 1 %; l’indice S&P 500, de 2,3 %; l’indice Nasdaq, de 0,7 %; l’indice des actions européennes Stoxx 50, de 1,8 %; l’indice FTSE 100 du Royaume-Uni a fait du surplace; l’indice des actions MSCI China a avancé de 0,8 % et l’indice MSCI Marchés émergents ($ US) a grimpé de 1,4 %.
Dénouement des opérations de portage
Le dénouement des opérations de portage en yen a amplifié le délestage abrupt du marché en août. On entend par « opération de portage » une stratégie de négociation qui consiste à emprunter des fonds à un taux d’intérêt peu élevé pour les investir dans un actif qui offre un taux de rendement plus élevé. Au Japon, les taux d’intérêt extrêmement bas et proches de zéro depuis des décennies font en sorte que le yen est la monnaie de financement la plus utilisée dans les opérations de portage. Les grands investisseurs, en particulier les fonds de couverture, réalisent des emprunts massifs en yen qu’ils utilisent pour investir dans d’autres actifs, notamment les sociétés technologiques américaines.
La Banque du Japon (BdJ) a pris les marchés de court en augmentant de 0,15 % son taux directeur, ce qui a provoqué une forte appréciation du yen par rapport au dollar américain. Cela a ensuite entraîné une vague de dénouement des opérations de portage en yen. Ces investisseurs ont été forcés de dénouer leurs positions en raison de la hausse des taux d’emprunt en yen, alors que les cours boursiers étaient déjà sous pression à cause des craintes de récession aux États-Unis et des piètres bénéfices des entreprises liées à l’intelligence artificielle.
Les exigences plus élevées en matière de garantie pour les prêts en yen et les appels de marge découlant de la baisse des cours boursiers ont déclenché une spirale descendante. Les prix des actifs qui doivent être liquidés (actions) baissent, alors que les prix des actifs qui doivent être achetés augmentent (le yen couvre les prêts), ce qui entraîne de nouveaux appels de marge, et ainsi de suite. Cette spirale a entraîné une chute de 26 % (du sommet au creux) de l’indice boursier japonais Nikkei, dont plus de 12 % en un jour.
Malgré toute la volatilité, le dénouement des opérations semble désormais terminé, depuis que la BdJ s’est engagée à tenir compte de la volatilité des marchés et de la stabilité financière à l’avenir. Faute avouée à moitié pardonnée, dit-on? L’indice Nikkei est revenu à son niveau de juin, en hausse de 15,5 % pour 2024. En août, l’indice Nikkei a reculé de 1,2 %.
Ambiguïté de la Fed
La Réserve fédérale américaine (Fed) a été une autre source de préoccupation. Les propos émanant de sa réunion de juin étaient fermes. La banque a maintenu ses taux inchangés pour une septième réunion consécutive, au taux cible le plus élevé en 23 ans. Encore préoccupée par l’inflation, la Fed a fait peu de cas de la hausse du chômage et n’a que légèrement adouci son ton.
Les investisseurs craignent que la Fed attende trop longtemps avant de réduire les taux et estiment qu’elle devrait plutôt agir sans tarder pour éviter toute faiblesse de l’économie. Nous croyons que la Fed aurait dû commencer son cycle de réduction des taux en juin. Elle n’a fait qu’aggraver la situation en ignorant la faiblesse du marché. À l’instar de la BdJ, la Fed a toutefois rapidement changé de discours. Dans son allocution prononcée à la fin du mois d’août, le président de la Fed, Jerome Powell, a clairement indiqué que le cycle de baisse des taux commencerait bientôt. Les Études économiques BMO ont rajusté leurs prévisions et prévoient qu’une campagne énergique de réduction des taux se mettra en branle dès septembre aux États-Unis, que les taux seront abaissés de 0,25 % à chacune des cinq prochaines réunions et qu’il y aura un assouplissement total de 2,25 % d’ici janvier 2026, soit un an plus tôt que prévu auparavant.
Notre stratégie : Équilibrée, avec une préférence pour les actions
Nous surpondérons les actions, en particulier celles du Canada et des États-Unis. Nous accordons une pondération neutre aux marchés développés internationaux (Europe et Japon) et nous sous-pondérons les marchés boursiers émergents. Dans la composante des titres à revenu fixe, nous surpondérons les obligations de sociétés de catégorie investissement et sous-pondérons les emprunteurs de qualité inférieure dans le segment des titres à rendement élevé.
Nous sommes bien positionnés; tout au long de l’année 2024, notre discipline nous a conduits à vendre des actions qui s’étaient appréciées afin d’étoffer nos positions dans les obligations et nous protéger si la peur concernant la croissance venait s’emparer des marchés.
Perspectives
Nous ne pouvons pas écarter la possibilité d’un regain à court terme des craintes liées à la croissance. Lorsque la plus grande économie tourne au ralenti, que la deuxième économie est en train de craquer et que toutes les autres présentent des vulnérabilités, cela vient jeter quelques doutes sur notre scénario de référence, selon lequel la croissance économique devrait ralentir, sans s’effondrer.
Nous croyons que les dynamiques de récession ne sont pas bien installées. Dans le cas contraire, elles pourraient être rapidement dissipées grâce à des réductions de taux par la Fed (et d’autres banques centrales). Le marché du travail américain ralentit, mais il ne pèse pas sur la croissance, contrairement à ce que certains craignent à l’heure actuelle. D’autres données économiques se sont révélées décevantes ou stables, mais certains segments continuent de faire preuve de résilience. Dans l’ensemble, les indicateurs laissent présager davantage un atterrissage en douceur qu’une récession imminente.
La période marquée par la faiblesse des bénéfices des sociétés en 2022 et en 2023 ainsi que par les nombreux resserrements tire à sa fin. Les dépenses des entreprises, le marché du logement et le secteur manufacturier ont tous été freinés par le cycle de resserrement des taux des banques centrales mondiales qui a été long et sévère. Nous prévoyons un rebond de l’activité et une reprise de la demande refoulée dans ces secteurs au cours des prochains trimestres. Jusqu’à présent en 2024, les marchés financiers affichent une excellente tenue en prévision de ce résultat. Les marchés tiennent compte (taux obligataires plus bas et cours boursiers plus élevés) de la réaction attendue face à une conjoncture où l’inflation s’est atténuée, où les conditions monétaires sont assouplies et où la croissance économique se stabilise, un contexte que nous considérons comme favorable aux investisseurs.
Le mot de la fin : Liquidité et évaluation à la valeur de marché
Lorsque les marchés des capitaux affichent une bonne liquidité, les opérations se font de façon efficace et transparente sans avoir de grandes répercussions sur le cours actuel de l’actif. Les cours peuvent baisser lorsque des groupes importants sont forcés de vendre (habituellement en raison d’obligations contractuelles relatives à des emprunts) et que peu d’acheteurs sont disponibles ou qu’ils savent que le vendeur est pressé de réaliser l’opération. Le dénouement des opérations de portage en yen que nous avons expliqué ci-dessus en est un exemple classique.
Pourquoi est-ce un bon exemple? Notre système est fondé sur l’évaluation à la valeur de marché. La dernière opération enregistrée établit le cours de clôture pour toutes les actions et les obligations cotées en bourse. Lorsque les conditions de liquidité sont mauvaises et que les prix auxquels les opérations sont conclues sont compromis, les investisseurs verront la valeur de leurs actions qui font l’objet de négociation pâtir des ventes faites sous le coup de la panique. Cette situation peut se produire même si rien d’important ou de grave ne s’est passé du côté des sociétés en question. En fait, les vendeurs sous pression peuvent se départir d’actifs de grande qualité simplement parce qu’ils en ont l’occasion ou parce qu’ils n’ont pas d’autre choix afin de respecter leurs obligations.
Pour les investisseurs à long terme, une bonne gestion de l’horizon de placement et des besoins en trésorerie constitue la meilleure stratégie pour composer avec les situations où la mauvaise liquidité crée des problèmes sur les marchés. Les investisseurs qui adoptent cette stratégie n’ont rien d’autre à faire que de gérer les émotions que provoque la perte momentanée de valeur de leurs placements.
Ce que nous cherchons à expliquer ici est que la réaction violente observée au début du mois d’août sur certains marchés boursiers est attribuable à la convergence de plusieurs événements. Si des événements ne s’étaient pas produits simultanément, ou si les conditions de liquidité avaient été meilleures, la réaction du marché n’aurait peut-être pas été aussi importante. La remontée rapide des marchés boursiers illustre bien pourquoi il vaut mieux éviter toute réaction de panique. Les marchés financiers fluctuent pour de nombreuses raisons. L’une d’entre elles est la mauvaise liquidité. Si vous savez comment composer avec ces conditions difficiles (souvent de courte durée), vous serez bien récompensé.
Les perturbations déclenchées par les ventes forcées sont les plus fortes. Cependant, il s’agit généralement d’un mécanisme qui permet d’éliminer les déséquilibres internes du marché, mais pas un changement majeur des dynamiques macroéconomiques. Ce n’est pas parce que les marchés boursiers ont fait des culbutes cet été qu’ils se sont effondrés.
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