Un processus bayésien est une méthode qui utilise le théorème de Bayes pour mettre à jour la probabilité d’une hypothèse à mesure que de nouvelles données ou de nouveaux renseignements deviennent disponibles.
– Thomas Bayes (1701-1761), statisticien, philosophe et ministre presbytérien anglais reconnu pour avoir mené les travaux fondamentaux à l’origine du théorème qui porte son nom.
La résilience est ce qui caractérise le mieux l’excellente tenue des marchés boursiers et obligataires au premier semestre de 2025. La combinaison de la résilience et de la patience a été essentielle à la réussite dans le contexte changeant, voire chaotique, que nous avons connu au cours des six derniers mois. En tant qu’investisseurs à long terme, nous adhérons fermement à cette approche.
Compte tenu de l’ampleur des chocs (et des chocs potentiels) auxquels l’économie mondiale a été confrontée cette année, les rendements des placements représentent une agréable surprise. Depuis le début de l’année, l’investisseur canadien représentatif détenant un portefeuille équilibré a obtenu un rendement total d’environ 5 %.
Comment les rendements peuvent-ils être si élevés?
Ces résultats positifs sont attribuables, selon nous, à trois facteurs clés. Tout d’abord, les économies sont en bonne santé (meilleure que prévu initialement). Deuxièmement, jusqu’à présent, bon nombre des chocs sont liés à des propositions qui n’ont toujours pas été mises en œuvre ou qui sont en cours d’examen par les décideurs eux-mêmes ou les tribunaux. Aux États-Unis, les volte-face concernant la rhétorique à l’égard des politiques sur de nombreux fronts, notamment les tarifs douaniers, la politique budgétaire (y compris le DOGE) et l’immigration, sont trop récentes pour que leurs répercussions puissent ressortir de façon significative dans les données. Enfin, les boucles de rétroaction clés inhérentes aux économies modernes ont envoyé des signaux (ou témoigné de la réalité par rapport à la fiction) qui ont entraîné une réduction des choix liés aux politiques lorsqu’ils se sont aventurés en territoire trop risqué.
Les conditions actuelles sont très incertaines. Au cours des prochains mois, nous assisterons à des débats enflammés sur l’évolution de l’économie et sur les répercussions des choix politiques (une fois que ceux-ci seront fixés). On s’attend à une certaine dégradation des données économiques imputable à toute cette incertitude.
Nos lecteurs réguliers se souviendront de nos discussions approfondies sur d’importantes boucles de rétroaction. Les mesures adoptées par les décideurs entraînent des conséquences qui peuvent comprendre des contestations juridiques, des réactions négatives de l’opinion publique et du lobbying dans certains secteurs. Fait plus important encore, les marchés boursiers et obligataires peuvent évoluer suffisamment pour inciter les décideurs politiques à modifier leur trajectoire. Cette boucle de rétroaction de mesures, de conséquences et de réactions contribue non seulement au rajustement des choix politiques de l’administration américaine, mais aussi de ceux d’autres gouvernements. Le fonctionnement de cette boucle est plus clair aujourd’hui qu’il ne l’était le 2 avril. Désormais, l’obtention d’un point d’équilibre implique une certaine volatilité, étant donné que les marchés financiers continueront d’exercer leur influence (de même que le système judiciaire et le tribunal de l’opinion publique). Néanmoins, nous avons bon espoir que ces boucles de rétroaction tempéreront les actions et permettront au monde de s’adapter aux nouveaux développements, et aux marchés financiers et aux économies, de tenir bon.
Flux de capitaux vers les territoires où ils sont le mieux traités
Le capital financier et humain est attiré par les territoires qui adhèrent à des principes fondamentaux comme la sécurité, la stabilité, la prévisibilité, l’imposition équitable et la primauté du droit. De plus, les biens publics comme des infrastructures adéquates et solides, une éducation et des soins de santé de qualité sont nécessaires pour que les entreprises puissent prospérer et innover. Ce sont toutes des considérations qui expliquent pourquoi l’argent et les gens sont attirés par un territoire plutôt que par un autre.
Outre ces enjeux primordiaux, l’accès à des marchés financiers qui fonctionnent bien est également essentiel, ce qui fait qu’un marché obligataire stable est requis. Tous les gouvernements empruntent de l’argent; les réactions du marché obligataire peuvent être cruciales et rapides. Lorsque les décideurs ont émis des idées incompatibles avec un traitement adéquat du capital, l’augmentation des taux obligataires a envoyé un signal critique qui a entraîné un ajustement rapide des politiques. Les autres boucles de rétroaction pourraient prendre plus de temps. Cependant, dans les sociétés modernes, capitalistes et démocratiques, tous les gouvernements sont (éventuellement) motivés (ou contraints) à faire des choix qui sont conformes à ces principes fondamentaux.
De nombreux gouvernements prennent conscience de la nécessité d’être plus autonomes et d’assurer leur sécurité – non seulement dans le domaine de la défense, mais aussi dans les domaines de l’énergie, de la cybersécurité, des infrastructures, de la fiscalité et des autres principes fondamentaux qui n’ont pas été abrogés. Le Canada en est un bon exemple. Les mesures prises par notre principal partenaire commercial sont un signal d’alarme qui nous incite à examiner la manière dont nous faisons des affaires dans ce pays. Ces mesures suscitent des discussions sur les pipelines, la politique des ressources, les relations commerciales, le commerce interprovincial, la fiscalité et la politique budgétaire, et les orientent dans des directions constructives. Les discussions actuelles donnent l’impression que nous pourrions être prêts à aller de l’avant avec des mesures destinées à stimuler la croissance économique, les investissements et la productivité. En faisant de l’adversité un avantage, nous avons l’occasion de renforcer le Canada pour en faire un meilleur endroit où investir, travailler et vivre.
Les marchés financiers parviennent de mieux en mieux à faire fi du bruit
Les investisseurs se laissent de moins en moins distraire par le bruit. Ils demandent ce que chaque mesure de politique signifie pour les actions ou les obligations des entreprises qu’ils détiennent. Les réponses de certaines sociétés – et les choix qu’elles font – auront d’importantes conséquences sur l’endroit où l’activité économique aura lieu et sur la façon dont les capitaux circuleront à l’échelle mondiale.
À l’échelle locale, ces considérations peuvent dominer notre pensée (ou les nouvelles locales). Néanmoins, poser des questions sur un changement dans la façon dont les affaires sont menées n’est pas la même chose que de se demander si les affaires seront menées tout court. Pour les actionnaires et les porteurs d’obligations, la question de savoir où et comment les sociétés génèrent des revenus est différente de celle de savoir si elles réaliseront un bénéfice.
Les changements qui se produisent dans l’ordre mondial sont importants. Ces changements pourraient ralentir l’économie ou faire augmenter les prix. Si les changements sont d’une ampleur raisonnable (ce que le calibrage de la boucle de rétroaction garantira) et si les ménages, les entreprises et les marchés financiers ont suffisamment de temps pour s’adapter, ceux-ci pourront y faire face.
Les deux faces des droits de douane
Soyons clairs : les droits de douane représentent un moyen inefficace de générer des revenus, de sorte qu’il est nécessaire de tenir compte des répercussions de la hausse des coûts (les droits de douane sont des taxes payées par les sociétés ou les consommateurs). Cependant, les déficits élevés (qui entraînent une hausse des coûts d’emprunt) représentent un enjeu plus important que les taxes et impôts aux États-Unis. Par conséquent, l’augmentation des recettes fiscales sous la forme de droits de douane peut être favorable si elle contribue à freiner la trajectoire budgétaire des États-Unis.
Il se peut que nous n’aimions pas ou que n’acceptions pas certains choix politiques. Pourtant, les marchés financiers et l’économie ont démontré leur capacité à s’adapter et à résister, de sorte que nous ne devrions pas jeter l’éponge ni faire des choix de placement fondés sur les émotions.
Les chiffres parlent
Depuis le début de l’année, les marchés développés internationaux sont en tête du peloton : l’indice MSCI EAEO (Europe, Asie, Extrême-Orient) a progressé de 17,4 %, mené par les actions allemandes. La Banque centrale européenne est en mode assouplissement. L’Allemagne augmente ses dépenses publiques, en particulier en matière de défense et d’infrastructures essentielles, ce qui profite aux entreprises industrielles du pays.
Au deuxième rang, l’indice MSCI Marchés émergents s’est adjugé 13,7 %, en raison de l’accélération des mesures de stimulation économique en Chine. Le succès surprenant de la société chinoise d’IA DeepSeek rappelle aux investisseurs qu’il n’y a pas si longtemps, les sociétés technologiques chinoises étaient les chouchous des investisseurs. Après une période de resserrement de la réglementation, Beijing se montre aussi plus conciliante à l’égard des entreprises privées du pays. C’est peut-être une nécessité dans un monde où leur portée pourrait être restreinte.
Les marchés boursiers canadiens aussi sont solides; l’indice composé S&P/TSX a progressé de 8,6 %. Rappelons toutefois que le marché boursier canadien n’est pas un miroir de l’économie canadienne. Les segments les plus fortement pondérés de l’indice composé S&P/TSX sont ceux des métaux et des mines (12 %), de l’énergie (16 %) et des services financiers (33 %). Même si ces secteurs sont cruciaux pour l’économie canadienne, ils occupent une place disproportionnée au sein de l’indice S&P/TSX. Les entreprises du secteur des ressources sont confrontées à des répercussions tarifaires plus légères, alors que les services financiers n’en subissent aucune. De nombreuses entreprises canadiennes appartenant aux secteurs assujettis à des droits de douane ont des usines, des installations et des activités importantes aux États-Unis, lesquelles ne sont pas assujetties à des droits de douane. L’assouplissement de la politique monétaire de la Banque du Canada est un autre facteur favorable.
Les marchés américains tirent de l’arrière par rapport aux principaux marchés, étant donné que les mesures politiques ont eu l’effet escompté, puisqu’elles touchent davantage le pays qui impose des droits de douane que les exportateurs. Après avoir atteint de nouveaux sommets, l’indice S&P 500 est passé à deux doigts d’un marché baissier (reculant de 18,9 % entre le 19 février et le 8 avril). Les changements de politique et la résilience ont permis à l’indice d’atteindre de nouveaux sommets et de progresser de 5,5 % pour l’année.
Les marchés obligataires ont aussi alimenté les comptes des investisseurs équilibrés, l’indice des obligations universelles FTSE Canada ayant avancé de 1,4 %.
Notre stratégie – Équilibrée, avec une légère préférence pour les actions
Nous croyons que la liste des choses qui pourraient bien tourner est plus longue que la liste des choses qui pourraient tourner mal.
Les principaux éléments de notre liste de risques comprennent un retour des menaces liées à des droits de douane élevés, une stagflation, un ralentissement économique ou une récession, une hausse du chômage, une flambée des tensions géopolitiques et une augmentation des taux obligataires imputable à des dépenses publiques exagérées.
En revanche, parmi les éléments qui pourraient bien aller, mentionnons une incidence plus modérée de l’inflation, des précisions en ce qui concerne les droits de douane, des gains de productivité découlant des nouvelles technologies, l’abaissement des taux d’intérêt, l’amélioration de l’efficience des gouvernements, l’augmentation des dépenses budgétaires au Canada, en Europe et en Chine ainsi qu’une meilleure position budgétaire aux États-Unis. S’y ajoutent la déréglementation, la réduction des obstacles au commerce interprovincial, l’accroissement de la diversification du commerce, la construction d’infrastructures (énergie, centres de données, extraction et transport des ressources) et la croissance des salaires réels.
Il y a lieu de croire que certaines choses qui pourraient mal tourner dans une certaine mesure se produiront; c’est toujours une question de degré. Certaines des choses qui pourraient bien tourner n’iront peut-être pas aussi bien que prévu. Cependant, la liste des facteurs positifs est plus longue, et les répercussions sont plus durables que celles de bon nombre des facteurs négatifs potentiels.
Les facteurs négatifs alimentent des boucles de rétroaction qui aident à corriger le tir en ce qui concerne les marchés, les politiques et les économies. Les facteurs positifs alimentent des cercles vertueux qui sont à la base du capitalisme : innovation et productivité, destruction créative, résilience et adaptation.
L’incertitude liée à l’attentisme qui s’annonce à court terme nous incite à maintenir notre répartition tactique de l’actif près d’un niveau neutre. Nous avons réalisé des profits sur les rebonds et sur les actifs affichant des rendements supérieurs. Nous continuons de surpondérer modestement les actions canadiennes et américaines, et nous attribuons une pondération neutre aux marchés développés internationaux ainsi qu’aux marchés émergents. Nous continuons de nous appuyer sur notre approche bien diversifiée pour composer avec la conjoncture et nous sommes convaincus qu’en faisant preuve de patience, nous obtiendrons des résultats positifs.
Le mot de la fin : Une approche bayésienne
En réexaminant notre scénario de référence du début de l’année (Perspectives des marchés financiers pour 2025), nous avons entrevu une possibilité d’enregistrer de nouveaux gains (modestes). Nous avons aussi souligné que nous pourrions devoir composer avec des craintes liées à la croissance, prenant la forme d’une correction, un phénomène normal sur les marchés boursiers haussiers.
Nous étions d’avis que les actions pouvaient dégager des rendements totaux d’environ 15 %. Nos cibles étaient de 28 600 pour l’indice composé S&P/TSX et de 6 600 pour l’indice S&P 500. Ces cibles demeurent valables. Compte tenu des perturbations auxquelles le monde est confronté, elles pourraient être atteintes entre le début et le milieu de 2026. En revanche, à l’automne, les marchés pourraient se projeter en 2026 et atteindre ces cibles dans les délais impartis, en tablant sur d’autres résultats positifs avant qu’ils ne se concrétisent.
En ce qui concerne les marchés des titres à revenu fixe, nous nous attendions à ce que la Banque du Canada abaisse le taux du financement à un jour, le faisant passer de 3,75 % (en décembre 2024) à 2,5 % en juin 2025. Nous prévoyons toujours un taux directeur de 2,5 %, mais en décembre.
En décembre 2024, nous nous attendions à ce que la Réserve fédérale américaine abaisse le taux des fonds fédéraux, le faisant passer de 4,75 % à 3,5 % d’ici la fin de 2025. Compte tenu de la résilience de l’économie américaine et d’une certaine incidence des droits de douane sur l’inflation, nous maintenons notre prévision d’un taux directeur à 3,5 %, mais repoussons la date cible au premier trimestre de 2026.
Fait important, malgré de légers changements apportés à nos prévisions concernant les banques centrales, le marché obligataire dans son ensemble évolue conformément à nos attentes. Nous prévoyions un rendement de 4 % du marché obligataire canadien pour l’ensemble de l’année. Comme ce marché a déjà progressé de 1,4 %, ce chiffre pourrait toujours être atteint. Si nous n’atteignons que 3 %, nous serions heureux des revenus de coupon plus élevés que cela implique à l’approche de 2026. À l’heure actuelle, notre solution combinée de titres à revenu fixe en gestion active génère un revenu annuel supérieur à 4 %.
Nous intégrons continuellement de l’information nouvelle et mettons à jour nos points de vue, en adoptant une approche scientifique dans l’esprit de Thomas Bayes. Il s’agit essentiellement d’un processus itératif d’apprentissage et de mise à jour. Dans ce contexte en évolution rapide, qui s’accompagne souvent d’une incertitude considérable en ce qui concerne la durée des événements macroéconomiques ou des mesures politiques, nous faisons preuve d’une patience accrue alors que nous révisons nos points de vue. Même s’il était tentant d’ajuster nos perspectives plus tôt cette année, l’expérience nous a appris à être patients, une approche qui continue de porter ses fruits. C’est en partie ce dont nous parlons, lorsque nous évoquons le processus et la rigueur qui nous guident en tant que gestionnaires de vos actifs.
Nous vous souhaitons un été agréable.
Veuillez communiquer avec votre conseiller en placement si vous avez des questions ou si vous souhaitez discuter de vos placements.