Parfois, la défense vaut mieux que l’attaque
Les valeurs défensives jouent un rôle important dans les portefeuilles, servant de lest durant les périodes de plus grande volatilité. Nous parlons ici des titres de sociétés moins exposées aux fluctuations économiques (en particulier à la baisse) et dont les revenus et les bénéfices sont donc plus transparents et plus prévisibles. Si ces valeurs tendent à ne pas augmenter autant en période de prospérité, leurs caractéristiques les rendent généralement moins vulnérables aux replis du marché. Nous pensons que le moment est venu de s’intéresser à ces entreprises et à ces secteurs, compte tenu de l’inflation persistante et de l’avis de notre analyste technique, selon lequel le marché devrait subir une légère correction au cours des prochains mois. Nous nous empressons d’ajouter que nous pensons toujours que la tendance à long terme du marché est à la hausse, et qu’il ne s’agit donc que d’une pause. Dans la grande catégorie des « valeurs défensives », nous comptons aussi les entreprises du secteur de la « défense » ou de la fabrication d’armes. Ces entreprises sont bien placées en ce moment en raison du contexte géopolitique et de l’augmentation des budgets de défense à l’échelle mondiale, sans compter leurs valorisations relativement faibles. Nous sommes toutefois conscients que les missiles et les avions de chasse ne correspondent pas forcément aux valeurs personnelles de chaque investisseur. Nous suggérons donc également d’autres secteurs plus prosaïques qui pourraient être intéressants, notamment ceux de la consommation de base, des soins de santé, des pipelines et des services d’utilité publique traditionnels. Ces deux derniers secteurs, en particulier, devraient être avantagés une fois les taux d’intérêt stabilisés, du fait de l’augmentation importante attendue de la demande d’électricité en Amérique du Nord. Mais surtout, ces secteurs offrent actuellement une bonne valeur, ce qui rend les perspectives d’appréciation du capital à long terme d’autant plus intéressantes.
La persistance de l’inflation (en particulier aux États-Unis) explique en grande partie pourquoi le marché pourrait avoir du mal à progresser à court terme. Plus précisément, l’indice de référence des prix à la consommation récemment publié est resté inchangé à 3,8 % en glissement annuel. C’est nettement mieux qu’il y a 18 mois, mais cela reste bien supérieur à la cible de 2 %. Cela réduit les chances et l’ampleur des réductions potentielles de taux par la Réserve fédérale américaine (Fed), alors que la banque centrale la plus importante au monde cherche à en finir avec la hausse des prix. Le résultat net est une hausse des taux à long terme qui réduit la juste valeur de la plupart des actions, en particulier celles à duration plus longue (c’est-à-dire celles qui sont très valorisées). Le point positif pour les investisseurs canadiens est que l’équipe des Études économiques de BMO s’attend toujours à ce que la Banque du Canada (BdC) opère sa première réduction de taux cet été, donnant une impulsion à l’indice S&P/TSX.
Fait intéressant, Doug Porter, économiste en chef de BMO, relève que « le parallèle historique le plus proche de la politique actuelle de la Fed semble se situer entre le milieu et la fin des années 1990. Après une série de hausses de taux de 300 points de base (pb) en 1994-1995, l’économie a en effet réussi un rare atterrissage en douceur, et les taux ont commencé à baisser au cours de l’année suivante. Cependant, les baisses se sont limitées à tout juste 75 pb, et les fonds fédéraux sont ensuite restés cantonnés dans une fourchette de 125 pb sur une période de cinq ans. » Nous sommes d’accord avec ce point de vue et—compte tenu du marché haussier exceptionnel observé au cours de ces années—nous pensons qu’il valide notre optimisme à long terme pour les marchés, en particulier si la productivité américaine continue de s’accélérer (espérons que le Canada finisse par se réveiller sur ce point).
Les cycles électoraux favorisent le recours aux titres de valeur et aux titres défensifs
À l’approche de l’élection présidentielle de novembre aux États-Unis, nous avons voulu mentionner une analyse du cycle électoral réalisée par nos partenaires de données chez NDR. Cette analyse montre que, d’un point de vue historique, nous devrions bientôt observer de meilleures performances de la part des secteurs et des titres dits de valeur ou présentant des caractéristiques défensives. Bien entendu, chaque cycle est différent et le passé n’est pas toujours garant de l’avenir, mais nous pensons que cela est imputable à l’incertitude inhérente aux résultats électoraux. Dans le cas présent, cette incertitude est amplifiée par des sondages serrés et l’attitude capricieuse de M. Trump quant aux relations étrangères et au commerce mondial, entre autres. Si l’on ajoute cette analyse à celle que nous avons effectuée sur les cycles de taux et de dynamique économique, les éléments probants suggèrent qu’il pourrait être opportun d’affecter de nouvelles sommes aux secteurs défensifs et de valeur qui languissent depuis un certain nombre d’années.
Augmentation de la demande d’énergie
La croissance de la demande d’énergie, en particulier, devrait s’accélérer en Amérique du Nord (et dans le monde), sous l’effet des investissements massifs dans les centres de données et l’intelligence artificielle, de l’augmentation du nombre de véhicules électriques et du rapatriement des activités de fabrication (pour renforcer les chaînes d’approvisionnement). Selon certaines estimations crédibles, la demande d’énergie aux États-Unis pourrait augmenter à un rythme annuel composé de 2,5 % à 3 %, environ, jusqu’à la fin de la décennie, après avoir été globalement stable au cours des dix dernières années. Ce chiffre ne semble pas énorme, mais compte tenu de la taille déjà considérable de ce marché, il faudra pour y répondre investir des dizaines de milliards de dollars dans de nouvelles installations de production, de transport et de distribution d’énergie dans les États américains et les provinces canadiennes. Un bon exemple de la situation difficile dans laquelle se trouvent certaines régions est celui d’Hydro-Québec qui, après avoir profité pendant des années d’une production excédentaire considérable, devrait être confrontée à une pénurie d’électricité de plus de 100 térawattheures dès 2027, selon une étude réalisée en mai par l’Institut économique de Montréal.
Nous aborderons ce thème plus en détail dans un prochain rapport, mais les enjeux en matière d’investissement sont considérables puisque l’électricité devra être produite à partir d’une combinaison d’énergie nucléaire de base (ce qui sera favorable pour les producteurs d’uranium), de gaz naturel (entreprises d’énergie et pipelines) et d’énergies renouvelables, ce que préfèrent la plupart des entreprises du secteur des technologies. Bien entendu, des entreprises comme Hydro One en Ontario (100 % électricité, l’une des seules en Amérique du Nord) et d’autres services d’utilité publique traditionnels profiteront de l’augmentation de la demande, dans la mesure où les organismes de réglementation autorisent des taux de rendement acceptables pour leurs investissements, ce qui est probable.
Quelques exemples récents d’entreprises permettent de mieux comprendre cette occasion. Northland Power construit un parc éolien en mer à Taïwan pour la fabrication de semi-conducteurs dans le cadre d’un contrat de 30 ans. TransAlta vient de mettre en service un parc éolien dans l’Oklahoma avec Amazon comme contrepartie, et TC Énergie construit un gazoduc dans le nord-ouest des États-Unis pour aider Bloom Energy et les centrales électriques au gaz de la région.
NextEra, une grande entreprise américaine de services d’utilité publique présente depuis longtemps dans le secteur des énergies renouvelables, a récemment fait état d’une forte demande de la part de centres de données, avec 3,5 GW actuellement en service et un carnet de commandes auprès des fournisseurs de technologie de 3 à 3,5 GW de plus. Qui plus est, la direction a souligné qu’elle prévoyait un taux de croissance annuel moyen de 15 % pour la demande de centres de données jusqu’en 2030.
Autre preuve de la croissance de la demande d’énergie – l’accord récemment conclu entre Brookfield Renewable Partners et Microsoft pour fournir 10,5 GW de capacité renouvelable à l’échelle mondiale, entre 2026 et 2030, dans le but de répondre à la demande de centres de données. Cet accord encourage Brookfield à constituer un vaste portefeuille de projets d’énergie renouvelable dans les années à venir.
Analyse technique
Dans notre dernier commentaire sur la stratégie, nous étions préoccupés par le fait que les marchés boursiers étaient surachetés. Nous indiquions aussi nous attendre un repli à court terme qui ramènerait les principaux indices à leurs moyennes mobiles ascendantes à 50 jours. Si l’indice S&P 500 et l’indice composé NASDAQ sont allés un peu plus loin que prévu, c’est en gros ce qui s’est produit au cours de la première moitié du mois d’avril. Mais si nous avons connu un certain répit durant la seconde moitié du mois, le principal problème est que la faiblesse de la première moitié a eu une incidence importante sur notre modèle de synchronisation à moyen terme. Les indicateurs hebdomadaires de largeur et de dynamique ont fait volteface et sont devenus négatifs après avoir atteint des niveaux de surachat parmi les plus élevés depuis des années, et l’optimisme haussier s’est lui aussi fortement contracté.
Cette dernière évolution sera en fin de compte salutaire pour les marchés d’actions. À l’heure actuelle, cela signifie que tous les investisseurs—des particuliers aux négociateurs professionnels de produits dérivés—cherchent à réduire les risques. Cela suggère aussi que le récent repli à court terme est susceptible de se transformer en un repli plus prononcé à moyen terme, comme cela s’est produit l’été dernier. À l’époque, les principaux indices avaient perdu entre 8 % et 10 % sur une période de trois mois, entre la fin de juillet et le début d’octobre. Si tel est le cas cette fois encore, il est probable que les moyennes mobiles à 200 jours soient sondées à nouveau à la fin du deuxième ou au début du troisième trimestre (S&P/TSX : 20 611, S&P 500 : 4 690). À première vue, cela ne semble pas extraordinaire, mais il s’agit essentiellement d’un recul partiel par rapport à la reprise que l’on connaît depuis octobre dernier, recul qui ramènerait les principaux indices au niveau où elles se trouvaient au début de l’année. Une autre façon de voir les choses est la suivante : le S&P 500 vient de connaître le meilleur redressement sur cinq mois depuis le creux du marché baissier pandémique il y a quatre ans. Avant cela, il faut remonter au rebond depuis le creux de la crise du crédit, début 2009, pour trouver un tel gain sur cinq mois. Il s’agit donc simplement d’une pause salutaire, et l’on s’attend à ce que ce marché haussier cyclique par ailleurs en bonne santé se hisse à de nouveaux sommets.
En règle générale, on recommande aux investisseurs de ne pas apporter de changements significatifs à leurs portefeuilles lors de replis de cette ampleur, puisqu’il s’agit essentiellement de « ralentisseurs » au sein de marchés haussiers pluriannuels plus importants. Toutefois, toute personne souhaitant réduire quelque peu son risque pourrait envisager des titres plus défensifs, entre autres ceux d’entreprises du secteur des services d’utilité publique. À titre d’exemple, l’indice des services d’utilité publique S&P 500 a récemment inversé une tendance pluriannuelle de sous-performance, s’échappant de son cycle de base et signalant peut-être le début d’une nouvelle tendance haussière à long terme avec une cible optimiste de hausse initiale de 17 %.
Au Canada, les actions du secteur des pipelines (que mesure l’indice du stockage et du transport du pétrole et du gaz S&P/TSX) semblent également prêtes à défier l’extrémité supérieure d’une tendance de base qui dure depuis un an. Une percée signalerait le début d’une nouvelle tendance haussière à long terme, avec une cible optimiste de hausse initiale de près de 20 %.
Les portefeuilles d’obligations peuvent aussi être plus défensifs
Par nature, les placements en titres à revenu fixe sont défensifs. Mais même au sein d’un portefeuille d’obligations, il est parfois préférable d’adopter une structure encore plus défensive. Il existe trois grandes façons d’y parvenir : 1) en maintenant une duration plus courte; 2) en augmentant la pondération de secteurs de meilleure qualité (c’est-à-dire en haussant l’exposition aux administrations publiques); et 3) en réduisant l’exposition aux émetteurs de titres d’emprunt de sociétés et secteurs à bêta plus élevé, y compris les titres d’emprunt moins bien notés.
Une duration plus courte—c’est-à-dire une sensibilité moindre aux taux d’intérêt—permet d’atténuer les effets à court terme d’une hausse des taux. Ceci est particulièrement important dans la mesure où une inflation stagnante entraîne une plus grande incertitude quant au cycle d’assouplissement et risque de maintenir une pression à la hausse sur les taux. Or, être défensif ne signifie pas nécessairement augmenter la part des liquidités. Si l’inversion de la courbe des taux et les taux directeurs élevés rendent les rendements des liquidités attrayants, cette situation risque de ne pas durer, puisque l’on s’attend à ce que la BdC commence bientôt à réduire son taux directeur. Il est en revanche possible de diminuer la duration en augmentant la pondération des obligations à deux ou trois ans. Par rapport aux liquidités, les obligations à court terme, tout comme les obligations à plus long terme du portefeuille, offriront un potentiel de gains en capital si la BdC réduit son taux d’intérêt en juin ou juillet. En outre, comme de nombreuses obligations à coupon faible se négocient encore à des prix très escomptés, la solution des obligations à court terme présente un atout supplémentaire : en effet, elle est plus avantageuse sur le plan fiscal que les intérêts que produisent les liquidités.
Pour ce qui est de la répartition sectorielle et des titres d’emprunt, une politique monétaire restrictive continuera à peser sur la croissance économique et les risques, réduisant ainsi le potentiel de resserrement des écarts de taux. Le marché des obligations de sociétés a été particulièrement vigoureux au cours des six derniers mois, surpassant largement celui des obligations d’État, et les différents secteurs de titres d’emprunt pourraient ne pas tous continuer à offrir le même potentiel de rendement. Dans une perspective défensive, les investisseurs pourraient envisager de réduire la pondération des obligations de sociétés au profit d’obligations d’État, en ciblant notamment les obligations à court terme du gouvernement du Canada et des provinces.
En ce qui concerne la pondération des titres de sociétés, si les marchés du crédit devaient être soumis à des pressions à court terme, les émetteurs à faible bêta, principalement dans les secteurs des prêts bancaires de premier rang, de l’automobile, des infrastructures et des services d’utilité publique, devraient offrir une plus grande stabilité des revenus et moins de volatilité sur le plan des écarts et des rendements. Dans le secteur des prêts bancaires de premier rang, nous préférons les créances requalifiées des six grandes banques, et dans celui de l’automobile, nous privilégions Honda et Toyota. Pour les secteurs de l’infrastructure et des services d’utilité publique, de nombreux émetteurs répondent à nos critères, mais nous accordons notre préférence à ETR 407, Hydro One et Toronto Hydro.
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